éducation

Le débat public sur l’école ne permet pas de refonder la politique d’éducation

Enseignant-chercheur en sciences de l'éducation

Alors que le débat public sur l’école laisse peu de place à la parole scientifique ou citoyenne et survalorise au contraire la parole politique, souvent mue par d’autres intérêts que ceux des acteurs directement concernés, il est urgent de refonder le débat démocratique, ses dynamiques de structuration et sa traduction en termes de politiques publiques : il en va de la santé du système scolaire et, plus encore, de la démocratie elle-même.

On pourrait s’attendre, dans une démocratie digne de ce nom, à ce que le débat public joue un rôle majeur dans la fabrique des politiques publiques proposées aux citoyens. Tel n’est pas le cas, en général, en France et il s’agit d’un problème démocratique sérieux.

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Dans une recherche publiée récemment sur le sujet[1], nous avons étudié comment se déployait depuis la fin des années 1990 le débat public sur trois sujets de politique d’éducation contrastés : l’enquête internationale PISA (Programme international pour le suivi des acquis des élèves), la lutte contre l’absentéisme des élèves et la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). Nous avons étudié les débats publics sur ces sujets dans quatre arènes de l’espace public : au Parlement, dans la presse écrite nationale, entre acteurs institutionnels (ministères, syndicats, associations de parents etc.) et dans le monde académique. Pour cela, nous avons analysé et recoupé de volumineux corpus de documents (comptes-rendus parlementaires, articles et dépêches de presse, publications scientifiques) et quatre-vingt-quatorze entretiens avec les acteurs de ces débats.

Cette recherche met en évidence trois effets majeurs de l’évolution du débat public sur la fabrique des politiques d’éducation. Le premier est un effet de découplage prononcé entre débat public et action publique, c’est-à-dire une déconnexion forte entre ce qui est débattu publiquement, et parfois avec vigueur, d’un côté, notamment dans les arènes politique et médiatique, et la réalité de l’action publique qui est effectivement mise en œuvre de l’autre.

Le deuxième effet est d’entretenir diverses formes d’ignorance collective sur les sujets débattus. Cette ignorance collective concerne aussi bien certains aspects des objets étudiés que les définitions alternatives des problèmes publics en présence ou plusieurs caractéristiques de l’action publique mise en œuvre pour les résoudre.

Le troisième effet peut être qualifié de segmentation, au sen


[1] Xavier Pons, Débattre des politiques d’éducation en France. Une enquête sociologique (1997-2022), Presses universitaires de Rennes, 2024.

[2] Xavier Pons, La Fabrique des politiques d’éducation. La rapidité sans la qualité ?, Presses universitaires de France, 2024.

Xavier Pons

Enseignant-chercheur en sciences de l'éducation, Professeur à l'université Claude Bernard Lyon I, membre du laboratoire Éducation, cultures, politiques (ECP, université Lumière Lyon II), membre du Centre de recherche sur les inégalités sociales (CRIS, Sciences Po Paris)

Notes

[1] Xavier Pons, Débattre des politiques d’éducation en France. Une enquête sociologique (1997-2022), Presses universitaires de Rennes, 2024.

[2] Xavier Pons, La Fabrique des politiques d’éducation. La rapidité sans la qualité ?, Presses universitaires de France, 2024.