Agnès Geoffray – Du geste en suspens
Le travail d’Agnès Geoffray se déploie depuis quelques années entre la photographie, l’image arrêtée, en mouvement ou en semi-mouvement, le texte et la performance, interrogeant notre rapport à l’histoire, à sa violence et à ses traces, aux gestes qui la traversent, aux récits. On pourrait dire, banalement, qu’il s’agit d’opposer là un geste de résistance à toutes les formes et expressions du pouvoir aujourd’hui et dans l’histoire. Mais par son attention singulière aux discontinuités, son travail joue de la violence et de la tension dans ce qu’elle nomme elle-même un « suspens catastrophique ».

Elle montre sans dénoncer. Elle regarde la brutalité du monde. Et parfois répare. Ses œuvres proposent de manière quelquefois anachronique une relecture des in-vus et des non-dits de l’histoire. Elle donne voix et corps aux silences des images. Elle va chercher ce qui sous-tend et ce qui traverse dans une certaine vibration, un certain tremblement. Elle creuse, déterre les fantômes et les ramène au jour pour qu’ils nous accompagnent. Ainsi des mots de prisonniers de guerre, des images témoignant de la violence des hommes entre eux, des faits divers, des récits intimes, des gestes d’opposition, aussi infimes soient-ils, se servant des archives, les mêlant à l’imaginaire. Réel et fiction s’entrelacent.
L’exposition au centre d’art Le Point du jour à Cherbourg, est une reprise de l’exposition Before the eye lid’s laid qui eut lieu au Centre photographique d’Île-de-France à l’automne 2017. On y trouve dans un nouvel accrochage un vaste ensemble de ses travaux réalisés depuis une dizaine d’années : différentes séries de photographies, textes sur différents supports, objets sous vitrines, projections vidéo ou de diapositives. Le rapport au texte, profondément ancré dans le travail de l’artiste, se trouve redoublé, dans l’exposition de Cherbourg, par des inserts critiques, à même le mur, du philosophe J. Emil Sennewald qui ponctuent l’exposition comme autant d’images de pensées fo