Une musique de la hantise – sur Quand Cécile de Philippe Marczewski
Une jeune femme disparaît – plus exactement, une jeune femme a disparu, puisque l’accident d’un petit avion de tourisme qui est la cause de la disparition de Cécile a toujours déjà eu lieu lorsque l’apprend puis y repense le personnage principal, dont la narration épouse le mouvement de pensées à la troisième personne du singulier tandis qu’il interroge jusqu’à son propre épuisement l’événement qu’aura constitué cet accident scandaleux à la marge de sa propre vie.

À la marge, en effet, puisque Quand Cécile n’est en rien ce qu’il est convenu d’appeler un livre de deuil. Sans le laisser du tout indifférent puisqu’il se souvient avec une précision photographique du moment où un coup de téléphone l’en a informé, l’annonce de la mort de Cécile n’a pas provoqué de traumatisme, en tout cas apparent : le visage et les yeux de Cécile qu’il n’avait pas revue récemment s’étaient déjà reculés dans le brouillard des souvenirs de jeunesse, à cette époque de la mort de Cécile où lui-même entrait dans la vie active, ayant quitté depuis plusieurs années l’âge du groupe et des amitiés estudiantines.
Pour scandaleuse qu’elle soit de fait, la mort de Cécile à 27 ans, le 8 août 2001 (mais il ne l’aura appris que le 10 août), n’aura pas relevé d’un instant tragique susceptible de fracturer la réalité pour la faire basculer d’un état dans un autre, d’autant que « il était heureux cette semaine-là, il était heureux depuis des mois heureux depuis deux ans, il aimait et était aimé et ce bonheur était une forteresse imprenable, aucune tristesse ne pouvait en affaiblir la muraille, le matin où il avait appris la mort de Cécile, juste après l’annonce il avait repris son travail, s’était concentré sur sa tâche. »
D’ailleurs, lorsqu’il avait rejoint la petite bande des anciens comparses d’études, petite bande reconstituée pour un soir autour de la mémoire de Cécile, il lui avait semblé éprouver moins de tristesse que les autres, se sentir « moins triste que ce qu’il aurait fallu, il aur