Savoirs

Catherine Coquery-Vidrovitch : « Les enfants français, quelle que soit leur couleur, doivent connaître l’histoire africaine »

Journaliste

Alors qu’à l’initiative du président Macron s’est ouvert ce vendredi à Montpellier un sommet Afrique-France, dont Achille Mbembe apparaît comme la cheville ouvrière, prenons le temps d’écouter celle qui fut sa directrice de thèse, Catherine Coquery-Vidrovitch. Avec Le choix de l’Afrique, un livre en forme d’égo-itinéraire, elle revient sur son objet, encore trop méconnu et peu enseigné, l’histoire riche et complexe de l’Afrique ainsi que sur l’inquiétante persistance du racisme anti-Noirs.

publicité

Pionnière de l’histoire africaine dans le paysage universitaire français depuis les années 1960, aujourd’hui professeure émérite de l’université Paris-Diderot, Catherine Coquery-Vidrovitch a longtemps étudié dans une grande solitude la violence du système colonial français et ses effets encore visibles, signe d’une longue indifférence de la société à la question coloniale et au racisme anti-Noirs. Observant une nouvelle curiosité massive pour les grands sujets de sa vie depuis une dizaine d’années, l’historienne revient dans un ego-itinéraire, Le choix de l’Afrique (La Découverte, à paraître le 14 octobre), sur ses recherches qui ont marqué des générations de chercheurs en France et en Afrique, à l’instar d’un Achille Mbembe. Rassurée par l’éveil des consciences et les progrès de la connaissance historique, elle regrette pourtant la persistance tenace du racisme, contre lequel elle n’a cessé de lutter en soixante ans d’engagements dans la recherche. JMD

Qu’est-ce qui, dans votre « ego itinéraire » déployé dans ce récit, Le choix de l’Afrique, vous semble constituer un fil directeur ? Celui d’une vie entièrement consacrée à l’histoire du colonialisme et des sociétés africaines.
Ma première passion, c’est l’histoire. J’ai toujours voulu faire de l’histoire, du plus loin que je me souvienne. Je suis pourtant née dans une famille scientifique, qui me destinait à faire plutôt des mathématiques ou de la physique, mais mon idée fixe est restée l’histoire. Là-dessus, il y a eu une conjonction de hasards même si en y réfléchissant, j’ai pensé que ce n’était pas tout à fait un hasard. Je me suis intéressée à l’Afrique subsaharienne. Quand j’ai commencé, on disait l’Afrique noire, mais on s’est aperçu depuis que c’était un terme colonial. Évidemment, on ne définit pas les peuples par leur allure physique. Ce qui m’a sauté aux yeux en revenant sur mon parcours, c’est que dès le départ j’étais très sensibilisée à la question du racisme, en l’occurrence du racisme


[1] Marc Ferro, Le livre noir du colonialisme. XVI-XXIe siècle, de l’extermination à la repentance, Robert Laffont, 2003.

[2] Edward W. Said, L’Orientalisme. L’Orient créé par l’Occident, Seuil, 2005, traduction de Catherine Malamoud.

Jean-Marie Durand

Journaliste, Éditeur associé à AOC

Notes

[1] Marc Ferro, Le livre noir du colonialisme. XVI-XXIe siècle, de l’extermination à la repentance, Robert Laffont, 2003.

[2] Edward W. Said, L’Orientalisme. L’Orient créé par l’Occident, Seuil, 2005, traduction de Catherine Malamoud.