Littérature

Jean-Michel Espitallier : « La part morale de l’écrivain, c’est de poser un diagnostic »

Journaliste

« Mettre des choses inhumaines sous le nez du lecteur. » Voilà ce que fait Jean-Michel Espitallier dans son nouveau livre, Tueurs, lorsqu’il expose cliniquement des scènes d’exactions commises en temps de guerre. Il revient ici sur ce qui l’a poussé à se plonger dans un bréviaire de l’horreur et sur ce que peut jouer la littérature, via le montage et l’énumération notamment, dans cette objectivation du réel, dont les images de l’Ukraine nous rappellent aujourd’hui la violence persistante.

Le nouveau livre de Jean-Michel Espitallier, Tueurs, sidérant autant qu’éprouvant, expose des scènes d’exactions commises en temps de guerre (lire ici la critique de Bertrand Leclair pour AOC). Après s’être largement documenté sur les massacres du XXe siècle et après s’être confronté aux images qui circulent depuis plusieurs années sur Internet, de l’Irak à la Syrie, l’écrivain et poète a décidé de décrire des actes de barbarie en les sortant de leur contexte historique, afin d’approcher au plus près la réalité anthropologique des tueurs. L’auteur revient ici sur ce qui l’a poussé à se plonger dans un bréviaire de l’horreur et sur ce que peut jouer la littérature, via le montage et l’énumération notamment, dans cette objectivation du réel, dont les images de la guerre en Ukraine nous rappellent aujourd’hui la violence persistante. JMD

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Votre livre Tueurs est publié dans un contexte particulier : celui du retour des images de guerre, des récits d’exactions et de viols par les soldats russes en Ukraine. La fusillade dans une école du Texas est venue aussi renforcer ce climat d’ultra-violence. Comment avez-vous reçu toutes ces images de guerre réapparues sur nos écrans ? Avez-vous trouvé bizarre le fait qu’elles percutent la sortie de votre récit ?
Cela ne fait au contraire que confirmer ce que je décris dans le livre. J’ai rendu le manuscrit en décembre, la guerre en Ukraine a commencé en février, je n’ai donc pas de récits concernant ce conflit. Or on a découvert non seulement les mêmes images, mais aussi les mêmes types de discours que ceux que je consigne dans le livre. Ce qui m’a étonné, c’est qu’on s’étonne des massacres de Boutcha et d’ailleurs. Toute guerre est une sale guerre. Les criminels de guerre se placent toujours dans une illusoire légalité, à l’inverse du tueur isolé, celui de l’école d’Uvalde au Texas par exemple. Les tueurs en série jouissent au fond d’être dans l’illégalité. Alors que les criminels de guerre, même s’ils sortent de la légali


Jean-Marie Durand

Journaliste, Éditeur associé à AOC

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