Éducation

Ce que l’École peut et doit toujours (sans surfer sur la vague)

Historien

Il y a des « territoires vivants de la République », des espaces où les enseignants font honneur à la tâche centrale qui leur est dévolue dans le régime républicain. À rebours des discours déclinistes ambiants, des faits divers violents mais exceptionnels que le battage médiatique présente comme la norme, il faut faire la lumière sur le quotidien discret des professeurs et sur les succès qu’ils rencontrent par lesquels l’École remplit son éminent rôle social.

L’automne 2018 place en tête des ventes une série d’ouvrages « définitifs » : Inch’Allah de Davet et Lhomme, sur l’islamisation de la Seine Saint-Denis, La France interdite, de Laurent Obertone sur la « fausse richesse »  que constituerait l’immigration, Le destin français de Eric Zemmour, qui, par son succès, relance un de ses précédents ouvrages, Le Suicide français, mais aussi Le grand abandon, d’Yves Ramou, et la liste n’est pas close. Face à ces succès commerciaux et médiatiques, l’ouvrage qu’à plusieurs enseignants nous avons écrit – Territoires vivants de la République – peine à faire entendre sa voix. Il propose, par contraste, une musique discrète, qui ne fait pas le buzz ou n’entretient pas les peurs ; une voix collective de la réalité vécue par des enseignants qui va à contre-courant d’un discours dominant, exploité médiatiquement en permanence. Et pourtant. Parmi les enseignants et l’ensemble des personnels éducatifs, inspecteurs, conseillers principaux d’éducation, etc, engagés dans ces territoires vivants de la République, beaucoup le savent.

Et ils sont majoritaires. Ils savent le rôle de la pédagogie et les possibilités de travailler avec la jeunesse. Avec un regard différent porté sur les enfants, sur leur famille, avec de la bienveillance qui n’est jamais un angélisme désarmant (et désarmé) mais une vertu permettant l’exigence sur les savoirs et les apprentissages, et qui postule que l’École peut réussir et le fait. Il est urgent, pour éviter le délitement accentué du tissu social, de rééquilibrer les discours sur les banlieues et leurs habitants, dans des territoires de la République à part égale avec les autres. Il est urgent de dire les réussites quotidiennes de cette École au plus près des familles populaires, celle qui permet d’ouvrir les élèves à des conceptions différentes et nouvelles de leur environnement proche, qui délie l’esprit et apprend des savoirs. Urgent aussi de rendre justice au travail quotidien des enseignants confrontés, comm


[1] Philippe Joutard, Grande pauvreté et réussite scolaire, changer de regard. – Rapport au ministre d’Etat ministre de l’Education nationale et de la Culture, Canopé, Académie de Toulouse, Octobre 1992

[2] Jean-Paul Delahaye, Grande pauvreté et réussite scolaire : le choix de la solidarité pour la réussite de tous, Rapport de l’Inspection générale de l’éducation nationale, IGEN – mai 2015

[3] Louis Chevalier, Classes laborieuses et Classes dangereuses à Paris pendant la première moitié du XIX siècle, Plon, Paris, 1958

Benoit Falaize

Historien, Chercheur correspondant au Centre d'Histoire de Sciences Po

Notes

[1] Philippe Joutard, Grande pauvreté et réussite scolaire, changer de regard. – Rapport au ministre d’Etat ministre de l’Education nationale et de la Culture, Canopé, Académie de Toulouse, Octobre 1992

[2] Jean-Paul Delahaye, Grande pauvreté et réussite scolaire : le choix de la solidarité pour la réussite de tous, Rapport de l’Inspection générale de l’éducation nationale, IGEN – mai 2015

[3] Louis Chevalier, Classes laborieuses et Classes dangereuses à Paris pendant la première moitié du XIX siècle, Plon, Paris, 1958