L’affaire Claas Relotius : un faussaire à l’heure des fake news
On pourrait en faire un de ces films qui, à l’instar des Hommes du Président, de The Insider ou plus récemment des Pentagon Papers, viendrait nous rappeler les conditions de possibilité de l’exercice vertueux du journalisme. Et on l’appellerait « Crime et Expiation », malgré le hiatus, parce que ce serait un titre plus juste que « Crime et Châtiment », qui a déjà servi. Pendant le générique, on verrait Claas Relotius, jeune star du reportage, se faire couvrir de tous les prix journalistiques possibles, pour le plus grand bonheur des responsables du Spiegel.

Puis le film commence, on verrait Relotius et Juan Moreno, l’envieux, enquêter en équipe de part et d’autre de la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis, avec la rédaction du Spiegel s’enthousiasmant une fois de plus pour les papiers de son reporter vedette, qui n’a pas son pareil pour se mettre des sources dans la poche là où d’autres mettent six mois à ne pas en trouver. Quel talent, de la grâce presque, et comment alors prêter sérieusement attention aux insinuations incrédules de Juan Moreno, un jaloux sans aucun doute. D’ailleurs Relotius, malin comme un singe, n’a aucune peine à fournir quelques fragments de preuves à ses collègues lorsque les premiers doutes surgissent à propos de son reportage sur un certain Monsieur Jaeger (en allemand : le chasseur !), un brave civil armé qui patrouille avec ses potes le long de la frontière entre l’Arizona et le Mexique en attendant le mur promis par le Président Trump.
Mais le fourbe Moreno insiste, profite d’un second reportage aux Etats-Unis pour enquêter sur l’enquête de son collègue, fournit des preuves de plus en plus accablantes. Comme dans les séries de HBO ou de Netflix qui respectent scrupuleusement le principe du retournement des personnages, on découvre ainsi, après environ quarante minutes de film, que l’ange était un méchant petit démon faussaire et que Moreno était en fait le journaliste héroïque de l’histoire. Gros plans sur les mines de plus en p