Dé-construire ensemble. édition spéciale Nuit des Idées

Déconstruire en architecture

Ingénieur-architecte, Artiste et urbaniste

Rotor, collectif belge pluridisciplinaire d’architectes et de chercheurs, a mis les flux de matériaux de construction au centre de son travail. Sa démarche attentive aux ressources, aux déchets et au réemploi, expose les enjeux de la déconstruction matérielle dans l’histoire récente de l’architecture. Alors que le réemploi revient au cœur des pratiques, il est aussi porteur de récits alternatifs en tant qu’il incite à des actions locales, circulaires et à petite échelle et qu’il permet de nouvelles alliances.

Au sens conceptuel le plus strict, l’économie circulaire assure un cycle sans fin de ressources réutilisables. Dans le secteur de la construction, ce concept s’articule souvent autour de la métaphore de la mine urbaine, qui envisage la ville comme une accumulation de matériaux précieux et d’éléments réutilisables, exploitable à la manière d’un gisement ou d’une ressource géologique.

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Au sein de notre activité à Rotor et Rotor DC, nous sommes quotidiennement impliqués avec de multiples acteurs de la filière du réemploi. Ce texte vise à démystifier la métaphore de l’urban mining, la mine urbaine, en examinant un ensemble de situations concrètes et en décrivant le cadre dans lequel le réemploi est actuellement pratiqué, puisque les deux principaux éléments de ce concept quelque peu romancé – la ville et la mine – doivent être envisagés de façon plus nuancée, de façon à pouvoir offrir une compréhension claire de l’économie circulaire.

Une brève histoire du réemploi dans la construction

Tout d’abord, les caractéristiques d’une mine urbaine diffèrent considérablement de celles des mines dans l’acception plus conventionnelle du terme. Contrairement aux réserves de matières premières géologiques, qui se trouvent concentrées par type de matériaux dans des zones circonscrites, la mine urbaine est par nature hétérogène et, jusqu’à présent, imprévisible, étant constituée d’une grande variété de matériaux différents présents en petites quantités à différents endroits. Les différentes catégories de matériaux de construction sont souvent très dispersées et, dans de nombreux cas, sont même possédées par différents types d’acteurs privés, ce qui rend l’exploitation d’une mine urbaine très différente de l’exploitation d’une mine géologique[1].

Il s’agit là d’une différence notable. En effet, le contexte économique actuel favorise largement l’exploitation minière ordinaire, avec de forts investissements permettant des rendements encore plus importants. L’exploitation minière


[1] Michaël Ghyoot, Lionel Devlieger, Lionel Billiet, André Warnier, Déconstruction et réemploi : Comment faire circuler les éléments de construction, Lausanne, Presses Polytechniques et Universitaires Romandes, 2018.

[2] Jeff Byles, Rubble: Unearthing the History of Demolition, 1ère éd. New York, Harmony Books, 2005.

[3] Daniel M. Abramson, Obsolescence : An Architectural History, Chicago ; London, The University of Chicago Press, 2016.

[4] Michaël Ghyoot, Lionel Devlieger, Lionel Billiet, André Warnier, op. cit.

[5] Salvo : BigREc Survey. A Survey of the UK Reclamation and Salvage trade, 2007. Cette recherche a été menée pour le Royaume-Uni et l’Irlande uniquement, mais il n’y a aucune raison de penser que la situation est différente sur le continent européen.

[6] Rotor ; DogA ; Dansk arkitekturcenter, eds: Behind the Green Door: A Critical Look at Sustainable Architecture through 600 Objects, Oslo, Norvège : Oslo Architecture Triennale, 2014.

[7] Le concept de « non-scalable » est tiré de : Anna L. Tsing, The mushroom at the end of the world: On the possibility of life in capitalist ruins, Princeton NJ : Princeton University Press, 2015. Traduction française : Anna L. Tsing, Le champignon de la fin du monde. Sur la possibilité de vie dans les ruines du capitalisme, La Découverte, 2017.

[8] Michaël Ghyoot, Lionel Devlieger, Lionel Billiet, André Warnier, op. cit.

[9] Alain Tourdjman, Thomas Le Dret : La cession – transmission des entreprises en France. Les Carnets de BPCE L’Observatoire, 2019. L’article ne se focalise pas spécifiquement sur le secteur du réemploi, mais les conclusions des auteurs sont bien en adéquation avec notre expérience.

Arne Vande Capelle

Ingénieur-architecte

Emmanuel Cortés Garcia

Artiste et urbaniste

Notes

[1] Michaël Ghyoot, Lionel Devlieger, Lionel Billiet, André Warnier, Déconstruction et réemploi : Comment faire circuler les éléments de construction, Lausanne, Presses Polytechniques et Universitaires Romandes, 2018.

[2] Jeff Byles, Rubble: Unearthing the History of Demolition, 1ère éd. New York, Harmony Books, 2005.

[3] Daniel M. Abramson, Obsolescence : An Architectural History, Chicago ; London, The University of Chicago Press, 2016.

[4] Michaël Ghyoot, Lionel Devlieger, Lionel Billiet, André Warnier, op. cit.

[5] Salvo : BigREc Survey. A Survey of the UK Reclamation and Salvage trade, 2007. Cette recherche a été menée pour le Royaume-Uni et l’Irlande uniquement, mais il n’y a aucune raison de penser que la situation est différente sur le continent européen.

[6] Rotor ; DogA ; Dansk arkitekturcenter, eds: Behind the Green Door: A Critical Look at Sustainable Architecture through 600 Objects, Oslo, Norvège : Oslo Architecture Triennale, 2014.

[7] Le concept de « non-scalable » est tiré de : Anna L. Tsing, The mushroom at the end of the world: On the possibility of life in capitalist ruins, Princeton NJ : Princeton University Press, 2015. Traduction française : Anna L. Tsing, Le champignon de la fin du monde. Sur la possibilité de vie dans les ruines du capitalisme, La Découverte, 2017.

[8] Michaël Ghyoot, Lionel Devlieger, Lionel Billiet, André Warnier, op. cit.

[9] Alain Tourdjman, Thomas Le Dret : La cession – transmission des entreprises en France. Les Carnets de BPCE L’Observatoire, 2019. L’article ne se focalise pas spécifiquement sur le secteur du réemploi, mais les conclusions des auteurs sont bien en adéquation avec notre expérience.