Société

La santé publique a-t-elle besoin de telles sciences sociales ?

Sociologue, Médecin, Politiste, Économiste, Politiste

Avec Santé publique année zéro, pamphlet contre la gestion de l’épidémie de Covid-19, Barbara Stiegler et François Alla enchaînent les diagnostics douteux, dangereux pour le débat public. Considérée en ruine par les deux auteurs, la santé publique a pourtant assumé, pendant la période épidémique, les fonctions qui sont les siennes avec les moyens dont elle dispose, en visant la protection de la population, la solidarité avec les plus vulnérables et la préservation des équilibres de notre société, y compris démocratiques.

L’épidémie a révélé l’importance autant que les carences de la santé publique, traditionnel parent pauvre d’un système de santé français à dominante curative et hospitalière. Dans ce contexte, on pourrait s’attendre à ce qu’elle trouve des promoteurs. Elle doit parfois se contenter de diagnostics douteux, sur lesquels il importe de s’arrêter tant ils véhiculent de poncifs mal fondés, dangereux pour la santé autant que pour le débat public.

Dans Santé publique année zéro, Barbara Stiegler et François Alla, respectivement professeurs de philosophie et de santé publique, proposent un violent pamphlet contre la gestion de l’épidémie de Covid-19. Prétendant se démarquer d’une vision dominante, qu’ils jugent trop biologique et épidémiologique, ils souhaitent appréhender la santé publique d’un point de vue social et politique, en indiquant mobiliser les sciences sociales en renfort d’une argumentation souvent simpliste et lacunaire, voire malhonnête.

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L’épure est résumée d’emblée : « Au nom de la santé publique, le gouvernement a continuellement remis en cause les libertés individuelles et collectives en inventant sans cesse de nouvelles restrictions (…) Et il l’a fait en suspendant la démocratie, choisissant de remettre le destin de toute une population entre les mains d’un seul homme et de son Conseil de défense ». Vus des sciences sociales et de la santé, trois points sautent aux yeux, qui deviennent faux à force d’être simplifiés. Le premier se rapporte à la présentation des faits, d’un extraordinaire parti pris. Politique, le second a trait à la démocratie. Le troisième, de nature plus sociologique, renvoie aux inégalités sociales.

Commençons par les faits. Pour les auteurs, aucun doute : « les mesures autoritaires de restriction n’ont pas seulement abîmé nos libertés, notre modèle démocratique et le contrat social qui sous-tend notre République. Elles ont aussi transformé le champ de la santé publique, justement, en un champ de ruine ». Et de citer, les mesu


Daniel Benamouzig

Sociologue, Chargé de recherche au CNRS

François Bourdillon

Médecin, Enseignant à Sciences Po Paris

Mélanie Heard

Politiste, Responsable du pôle santé de Terra Nova

Florence Jusot

Économiste, Professeur à l’Université Paris-Dauphine

Frédéric Sawicki

Politiste, professeur de science politique à l’Université Paris 1-Panthéon-Sorbonne, chercheur au Centre européen de sociologie et de science politique (CESSP-CNRS)