Architecture et soin : des forces et des intérêts communs
En 2020, le projet de recherche « architecture et care » était lancé au sein de la Chaire de Philosophie à l’Hôpital[1], afin de travailler sur le faisceau complexe des relations entre architecture et soin : en quoi l’architecture participe-t-elle – ou non – au soin, et le soin peut-il être « architecturé » ?

En retour, une réflexion centrée autour du soin peut-elle permettre d’engager une transformation de l’architecture ? Le projet, amorcé à l’initiative de la philosophe et psychanalyste Cynthia Fleury, s’attache ainsi à étudier les dimensions architecturales, et plus généralement spatiales, de la recherche sur le soin portée par la Chaire depuis 2016.
S’il nous a paru justifié de mettre en relation les champs disciplinaires de l’architecture et du soin, c’est aussi parce que les deux disciplines en question sont en difficulté, pour ne pas dire en crise, chacune évidemment pour des raisons et dans des formes bien différentes. Pour ce qui est du soin, on connaît suffisamment l’état de délabrement de tant de ses institutions, de tant ses lieux, dénoncé par beaucoup sans que rien ne soit réellement fait.
Pour l’architecture, c’est probablement moins évident, et puis s’il y a une crise celle-ci pourrait paraître moins préoccupante, moins urgente que celle que traverse le système de santé. C’est en partie vrai mais il faut bien voir aussi que les travers contemporains de l’architecture – l’asservissement d’une grande partie de sa production à des objectifs purement économiques, la remise en question trop lente d’un modèle « brutaliste[2] » de production, l’entretien de logiques de conception normatives et validistes, la désertion massive des champs de l’esthétique et du symbolique, etc. –, ces travers sont également des questions prioritaires car ils participent d’une même crise plus générale des sociétés contemporaines : une crise que l’on pourrait justement décrire comme une crise du soin et qui prend en réalité la forme, plus simplement, d’une disparition