Politique

Le gouffre de la méthode Macron en Kanaky-Nouvelle-Calédonie

Ancien vice-président de la Ligue des droits de l’homme en Nouvelle-Calédonie, Enseignant

Dans l’Histoire qui s’écrit en Kanaky-Nouvelle-Calédonie, vouloir à tout prix « aller vite », comme l’a fait Emmanuel Macron, c’est forcément « aller contre » les acquis politiques du processus de décolonisation, et donc « contre » la reconnaissance du peuple colonisé. Au-delà d’explications sociales, économiques et historiques, la situation présente sur l’île apparaît comme une conséquence directe et immédiate de cette position d’humiliation assumée par le président français, sous influence politique de l’extrême droite.

En quelques jours, la situation en Kanaky-Nouvelle-Calédonie est passée du feu qui couve à l’embrasement. Les habitants du « caillou » se trouvent plongés dans un climat de violence extrême et aux perspectives absolument inconnues. À des milliers de kilomètres, la « métropole » prend soudain la mesure de la situation, sur cette île lointaine dont le sens commun a retenu qu’il y a quatre décennies la menace de guerre civile a mené à un statut exceptionnel au sein de l’ordre institutionnel français.

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Le nombre de bâtiments, magasins et autres mobiliers urbains brûlés à Nouméa et dans les environs, dont le décompte est fait en direct par les journalistes et observateurs sur place, fait état d’un chaos difficilement descriptible pour ceux qui ne connaissent pas ce territoire. Un chaos qui se résume dans cette phrase d’un ami sur place, prononcée en direction de l’auteur qui est aujourd’hui en métropole : « Il n’y a pas un lieu que tu connais, qui n’a pas brûlé ». Manière de rappeler que les chiffres et récits qui nous viennent depuis là-bas n’ont de sens que ramenés à l’univers si restreint de l’île. Nous parlons là d’un territoire de 270 000 habitants. Deux arrondissements de Paris.

À cette échelle, où 70 à 75% de la population vit sur le grand Nouméa (Nouméa, 100 000 habitants, Dumbéa, Païta, Mont dore qui en sont les communes limitrophes), il faut mesurer le tsunami dévastateur qui vient de s’abattre en trois jours. Une centaine de commerces, entreprises ou établissements publics ont été brulés et/ou pillés. Quasiment tous les supermarchés du petit de quartier en passant par l’hypermarché et ses magasins attenants ainsi que tous les concessionnaires automobiles ont été dévastés. Même des usines ont été attaquées : Le Froid, usine de bière et de sodas où des cuves d’azote ont menacé d’exploser ; Biscochoc, l’usine locale de chocolat. Des maisons de particuliers (sans que leurs habitants n’aient été physiquement attaqués) ont été brulées, tout comme des centai


[1] Nous reprenons ici les mots du militant Michel Lolo, interviewé par le journal L’Humanité.

Pascal Hebert

Ancien vice-président de la Ligue des droits de l’homme en Nouvelle-Calédonie

Ulysse Rabaté

Enseignant, Président de l'association Quidam pour l'enseignement populaire, Ex-Conseiller municipal de Corbeil-Essonnes

Notes

[1] Nous reprenons ici les mots du militant Michel Lolo, interviewé par le journal L’Humanité.