Éducation

Parcoursup, l’égalité devant le juge

Sociologue

Alors que la dernière phase de Parcoursup vient de s’achever, on pourrait voir exploser le contentieux universitaire relatif aux admissions. Le système de sélection mis en place de manière systématique a en effet profondément modifié le rapport des étudiants à l’université, en le fondant désormais sur le principe de la transparence. Dès lors, le juge administratif devient le dernier garant, et un acteur légitime du parcours universitaire au risque d’une rupture d’égalité.

La date du 21 Septembre dernier a marqué la fin de la phase complémentaire de validation des vœux sur la plateforme d’orientation « Parcoursup ». À l’heure où de nombreux médias se lancent dans le « bilan » de cette réforme qui fait de la sélection le mode routinier de l’accès à toutes les filières de l’enseignement supérieur, la dernière phase de Parcoursup rappelle surtout que la loi Orientation et Réussite des Etudiants (ORE) refonde en profondeur le rapport entre l’institution universitaire et les étudiants au travers du principe de transparence, tout comme elle marque l’émergence d’un acteur dont on peut penser qu’il deviendra rapidement central dans les controverses liées à l’accès dans l’enseignement supérieur : le juge.

En effet, la loi Orientation et Réussite des Etudiants (ORE) prône une culture de la transparence et prévoit l’ouverture de différents recours qui visent à justifier et à éclairer les décisions des établissements, en particulier dans le cas des candidats qui auraient fait l’objet d’un ou de plusieurs refus dans les filières de leurs choix.

Au-delà des commissions rectorales, dont le rôle est, dans chaque académie (ou groupes d’académies), d’« accompagner les lycéens » sans proposition, il est possible, au titre de l’article 612-3 du code de l’éducation, de saisir le chef d’établissement demandé dans le but de connaître les motifs justifiant de la décision individuelle de refus d’admission. Il s’agit également d’éclairer les critères et les modalités d’émission de la décision. A l’heure de sa présentation, cette mesure semblait alors incarner l’avènement d’un principe de transparence comme une norme régulatrice dans l’enseignement supérieur, alors qu’il s’imposait comme valeur centrale du rapport entre l’État et les citoyens, notamment dans le cadre de la loi du 15 Septembre 2017 relative « à la confiance dans la vie politique. »

Cette demande de transparence repose sur une fiction, selon laquelle les critères de sélection et les modalités de


[1] Mitchell Stevens, 2008, Creating a class. College admissions and the creation of elites, Cambridge : Harvard University Press.

[2] Sur ce point, voir l’excellent ouvrage de Daniel Sabbagh, 2007, L’égalité par le droit. Les paradoxes de la discrimination positive aux Etats-Unis, Paris : Economica.

[3] Michael Olivas,  2013, Suing Alma Mater. Higher education and the Courts, Baltimore : The John Hopkins University Press.

[4] Robert Carin, Anna Neyrat, « Le contentieux universitaire et la modernité : propos introductifs », communication du 20 Avril 2018 dans le cadre du colloque « Contentieux universitaire et modernité », Université de Bretagne-Sud, Vannes.

[5] Ibid.

[6] Annabelle Allouch, 2017, « L’ouverture sociale par e marché ? Sociologie de la captation des classes populaires à l’Université d’Oxford », Revue française de sociologie, 2017/2, vol. 58., p. 253-265.

[7] Sur ce point, voir notre ouvrage paru en 2017 : La Société du concours. L’empire des classements scolaires, Paris : Seuil/République des idées (p.92).

Annabelle Allouch

Sociologue, Maîtresse de conférences à l'Université de Picardie-Jules Verne (CURAPP-ESS)

Notes

[1] Mitchell Stevens, 2008, Creating a class. College admissions and the creation of elites, Cambridge : Harvard University Press.

[2] Sur ce point, voir l’excellent ouvrage de Daniel Sabbagh, 2007, L’égalité par le droit. Les paradoxes de la discrimination positive aux Etats-Unis, Paris : Economica.

[3] Michael Olivas,  2013, Suing Alma Mater. Higher education and the Courts, Baltimore : The John Hopkins University Press.

[4] Robert Carin, Anna Neyrat, « Le contentieux universitaire et la modernité : propos introductifs », communication du 20 Avril 2018 dans le cadre du colloque « Contentieux universitaire et modernité », Université de Bretagne-Sud, Vannes.

[5] Ibid.

[6] Annabelle Allouch, 2017, « L’ouverture sociale par e marché ? Sociologie de la captation des classes populaires à l’Université d’Oxford », Revue française de sociologie, 2017/2, vol. 58., p. 253-265.

[7] Sur ce point, voir notre ouvrage paru en 2017 : La Société du concours. L’empire des classements scolaires, Paris : Seuil/République des idées (p.92).