Qui veut la peau des sciences économiques et sociales ?
Dimanche 11 février, à trois jours de la présentation par le ministre de l’Éducation nationale d’une réforme du lycée et du baccalauréat, le site des Échos se faisait le relais d’une rumeur sans doute peu compréhensible pour le commun des lecteurs. Selon le quotidien économique, Jean-Michel Blanquer pourrait annoncer la scission de l’enseignement des sciences économiques et sociales (SES) « en différentes disciplines – sciences économiques, sciences politiques, droit… –, et ainsi faire coïncider les disciplines du lycée avec celles de l’enseignement supérieur ». Selon la source anonyme, un tel découpage serait nécessaire pour permettre « à l’université de savoir si les attendus [prévus par Parcoursup] sont au rendez-vous ou pas ». Reste à savoir pour cet interlocuteur bien informé « si le ministre va aller au charbon avec l’APSES (Association des professeurs de sciences économiques et sociales), car une césure des sciences économiques et sociales ne se ferait pas sans cris ni heurts ». Quels enjeux sous-tendent exactement un tel redécoupage, et en particulier pourquoi cette association disciplinaire regroupant quelque 2000 adhérent.e.s (soit plus d’un tiers des professeur.e.s de SES) serait-elle prête à aller au conflit ?
Pour le comprendre, il faut remonter à la création de cet enseignement il y a à peine plus d’un demi-siècle. À la rentrée 1966, dans le cadre, déjà, d’une réforme du lycée pilotée par le ministre de l’Éducation nationale Christian Fouchet, est expérimenté à la demande du ministre lui-même un enseignement d’« initiation aux faits économiques et sociaux » auprès de quelque 200 classes de seconde, répondant selon Élisabeth Chatel à une « volonté de modernisation de l’école et d’ouverture sur le monde contemporain ». Rapidement rebaptisée « sciences économiques et sociales », celle-ci se voit rapidement placée au centre de l’une des 5 nouvelles séries générales devant mener au baccalauréat – la B –, et constitue la reconnaissance d’une «