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Les trompe-l’œil du « 100 % santé »

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Alors que le projet de loi de financement de la sécurité sociale a été adopté mardi à l’Assemblée Nationale, la transformation du système de protection sociale se poursuit vers toujours plus d’individualisation. Au cœur des discussions l’an dernier, la réforme du « 100% santé » permet d’analyser rétrospectivement cet affaiblissement des mécanismes de solidarité collective au profit de logiques assurantielles privées.

Bien identifié par la recherche en sciences sociales et par les services de l’État et de l’assurance maladie, le phénomène du renoncement aux soins révèle les inégalités de santé que produit le système sanitaire français dont l’universalité est alors ramenée à son statut d’intention.

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Si ses causes sont multiples, des raisons financières expliquent en grande partie cette insatisfaction des besoins de soins. Le renoncement se concentre ainsi sur des soins plus faiblement remboursés par l’assurance maladie (équipements optiques, prothèses dentaires, etc.) et dont le niveau de participation financière des assurés – leur « reste à charge » – dépend de l’acquisition d’une assurance complémentaire et de la qualité de ses garanties. Ainsi, 17 % des assurés sociaux de plus de 18 ans ont renoncé à des soins dentaires et 10 % à des soins optiques pour des motifs financiers en 2014, selon l’Enquête santé et protection sociale de l’IRDES. Si l’on s’intéresse au quintile le plus pauvre de la population, ces taux de renoncement montent respectivement à 28 et 17 %.

C’est en réponse à ce problème sanitaire qu’est lancée en 2018 la réforme dite du « 100 % santé » qui vise à supprimer le reste à charge des assurés dans les domaines de l’optique, du dentaire et des aides auditives. Promesse électorale du candidat Macron, cette couverture financière sera progressivement mise en place entre 2019 et 2021.

Elle porte sur un panier de produits de santé à prix plafonné, arrêté par l’administration, qui couvre un large éventail de soins optiques et prothétiques (verres pour l’ensemble des troubles visuels, prothèses dentaires, etc.). Ces soins sont remboursés conjointement par l’assurance maladie, dont la contribution est rehaussée, et par les assurances privées (mutuelles, sociétés d’assurance, institutions de prévoyance), contraintes de couvrir l’important reliquat, auxquelles les individus sont affiliés à titre individuel ou dans le cadre d’un contrat collectif d’entreprise.

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Renaud Gay

Politiste, Institut de recherches économiques et sociales

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