Haut-Karabakh, une mémoire à vif
Pourquoi le conflit ravivé entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan depuis le 27 septembre est-il perçu par les Arméniens du monde entier comme une lutte pour la survie de leur peuple ? À première vue, on se trouve face à un conflit territorial classique, une crise qui aurait éclaté il y a une trentaine d’années. Le Haut-Karabakh est une région sécessionniste du Caucase, une zone grise de la géopolitique héritée de l’Union soviétique, disputée entre deux jeunes États.

Historiquement peuplé d’Arméniens, rattaché à l’Azerbaïdjan par Staline en 1921, le Haut-Karabakh fait, selon plusieurs résolutions successives des Nations Unies, partie intégrante du territoire de l’Azerbaïdjan redevenu indépendant en 1991. La province, occupée par l’Arménie, a été rebaptisée république d’Artsakh.
Après une première guerre (1988-1994) sanglante, des pogroms anti-arméniens à Soumgait et Bakou, un nettoyage ethnique et un massacre de civils azéris à Khojaly, 30.000 morts et finalement un cessez-le-feu en 1994, le conflit s’est gelé, un statu quo s’est installé. Mais la haine entre les deux voisins n’est jamais retombée. Alors quand Bakou, en position de force, s’est lancé militairement à la reconquête de ce territoire fin septembre, le brasier s’est rallumé aussitôt. De part et d’autre, la mobilisation générale a été décrétée dans une atmosphère d’exaltation nationaliste. Les vétérans de la première guerre du Karabakh, le « jardin noir », ont repris les armes.
Pourtant, l’histoire commence bien avant les premiers heurts inter-communautaires de 1988. La plupart des analyses mésestiment souvent un paramètre essentiel pour comprendre la profondeur historique de ce conflit et le sentiment de revanche qui anime les belligérants. Sa dimension psychologique. Que ce soit en Arménie, État fondé sur l’ancienne république soviétique, ou dans la diaspora arménienne, disséminée à travers le monde après le génocide perpétré par le gouvernement Jeune Turc en 1915, cette nouvelle guerre ne sera jamais considé