Savoirs

Vive l’éco-histoire ! La statistique n’est pas une discipline facultative

Économiste, Economiste, Economiste, Economiste

En réponse à la critique parue dans AOC de leur article établissant une relation statistique entre Verdun et Vichy, la collaboration et les réseaux d’anciens combattants ayant servi sous les ordres de Pétain, les économistes prennent de nouveau la parole pour reconnaître, spécifier et nuancer certains reproches leur ayant été adressés. Contre les accusations de déterminisme, de méthode, d’approximations, les auteur.e.s rappellent l’importance de se nourrir des travaux historiques, mais regrettent l’anti-économisme rendant difficile la nécessaire pluridisciplinarité qui, seule, peut éclairer ces débats historiographiques houleux.

Le 25 février dernier, Anne-Sophie Anglaret, Tal Bruttmann, Sarah Gensburger, André Loez et Antoine Prost publiaient dans AOC un texte intitulé « De Verdun à Vichy et retour : quand des économistes font fausse route », en réponse à l’article que nous avions écrit quelques jours plus tôt : « De Verdun à Vichy, de héros à traîtres – évolution politique des anciens combattants. » Notre texte en français présente en quelques pages certains résultats d’un projet de recherche de long cours qui a donné lieu à un premier document de travail en anglais publié sous le titre « Heroes and Villains: The Effects of Combat Heroism on Autocratic Values and Nazi Collaboration in France ».

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Nous tenons pour commencer à remercier vivement nos collègues pour leur lecture attentive de nos travaux de recherche et nous réjouissons de ces échanges pluridisciplinaires qui, nous l’espérons, pourront donner lieu à des collaborations futures. Nous croyons en effet en la force de l’interdisciplinarité et en la complémentarité des approches historiques quantitatives et qualitatives.

En un mot, nous étudions dans notre travail de recherche les déterminants de la collaboration en France pendant la seconde guerre mondiale. C’est un vaste sujet qui a donné lieu à une littérature riche et abondante, et dont nous nous sommes nourris. Notre apport à l’historiographie de la seconde guerre mondiale est modeste : nous abordons la question de la collaboration en considérant une hypothèse plausible – le rôle joué par les réseaux de héros constitués lors de la première guerre mondiale, en particulier autour de Philippe Pétain lors de la bataille de Verdun. Il ne s’agit naturellement que l’une des multiples dimensions de cette question complexe ; nous pensons cependant qu’il est intéressant de s’y pencher.

Concrètement, nous montrons que les soldats qui ont servi sous Pétain lors de la bataille de Verdun et leurs proches ont une probabilité significativement plus élevée d’avoir des activités collabo


[1] Notons au passage que cela est le cas alors même que, nous l’avons vu plus haut, le 146e régiment est un régiment dont la composition est complétée par des troupes en provenance d’autres départements que ceux affiliés à son bureau de recrutement régional.

[2] Et c’est précisément pour cela que nous n’utilisons pas dans notre analyse les régiments constitués après le début de la guerre.

Julia Cagé

Économiste, Professeure à Sciences Po Paris

Anna Dagorret

Economiste, Doctorante à l'Université de Stanford

Pauline Grosjean

Economiste, Université de Nouvelle-Galles du Sud (UNSW Sydney)

Saumitra Jha

Economiste, Professeur associé à la Stanford Graduate School of Business

Notes

[1] Notons au passage que cela est le cas alors même que, nous l’avons vu plus haut, le 146e régiment est un régiment dont la composition est complétée par des troupes en provenance d’autres départements que ceux affiliés à son bureau de recrutement régional.

[2] Et c’est précisément pour cela que nous n’utilisons pas dans notre analyse les régiments constitués après le début de la guerre.