La forme des épidémies
Le 29 janvier 2020, un peu moins d’un mois après que les premiers cas de Covid-19 furent détectés à Wuhan, les autorités sanitaires chinoises publiaient un rapport clinique concernant leurs 425 premiers cas, les qualifiant de « première vague de l’épidémie ».
Le 4 mars 2020, l’épidémiologiste Antoine Flahault s’interrogeait : « La Chine a-t-elle été le témoin d’une vague annonciatrice [herald wave], pour utiliser une terminologie empruntée aux spécialistes des tsunamis, et doit-on s’attendre au déferlement de la grande vague ? » Le journal The Asia Times prévenait quant à lui qu’« une deuxième vague mortelle de Covid-19 pourrait s’abattre sur la Chine comme un tsunami. »

Le tsunami frappa cependant ailleurs, déferlant sur l’Iran, l’Italie, la France, puis les États-Unis. Fin avril 2020, alors que les États-Unis avaient dépassé le million de cas, les prévisions à base de vagues s’assombrirent. D’éminents épidémiologistes prédirent alors trois « scénarios de vague » possibles (qu’un journaliste de Boston assimilait à des « paysages marins ») : de petites mais récurrentes flambées, le déferlement d’un « monstre de vague » ou, troisième scénario, une crise persistante. En fait, de nombreux pays connurent leurs plus grandes flambées épidémiques, parfois sous la forme d’une seconde ou d’une troisième vague distincte, à la fin de l’automne.
Le principe de la vague est depuis longtemps utilisé pour décrire, analyser et prévoir le comportement d’une épidémie. La vague, en tant qu’hybride de diagramme, de mathématiques et d’image, aide à représenter les données épidémiques, mais elle fait aussi bien plus que cela. L’image de la vague est devenue, dans le domaine de la santé publique, un instrument de gestion et de prédiction, voire de prophétie, du fait qu’elle offre une vision synoptique et schématique de la dynamique qu’elle décrit.
Le fait de réfléchir en termes de vague épidémique a connu trois grandes périodes : les vagues ont d’abord été utilisées comme un moy