Politique

Primaire populaire : le « peuple » de gauche (tout) contre ses partis ?

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Ce jeudi s’ouvre le vote d’investiture de la Primaire populaire. Présentée par ses partisans comme la seule issue démocratique viable face au marasme partisan qui afflige nombre de citoyen.ne.s de gauche, cette initiative originale et inédite serait, selon ses détracteurs, trop tardive et manipulée par une social-démocratie en perdition… Une dispute qui apparaît riche d’enseignements pour saisir les mouvements tectoniques qui traversent la gauche.

Parmi tous les sujets qui divisent la gauche, la tenue de la Primaire Populaire (PP) tient aujourd’hui le haut du pavé. Trop tardive, manipulée par une social-démocratie en perdition pour ses contempteurs, elle est dans le même temps présentée par ses partisans comme la seule issue démocratique viable face au marasme partisan qui afflige nombre de citoyen.ne.s de gauche. Sans surestimer l’intérêt du grand public pour cette dispute, elle est toutefois riche d’enseignement sur des mouvements tectoniques qui traversent la gauche.

Le mécanisme même de la primaire suit une trajectoire de réappropriation « citoyenne » qui s’opère au sein d’un public politisé. Inventée dans les partis politiques dominants (le PS puis l’UMP et LR), d’abord fermée (réservée aux adhérents) puis ouverte aux électeurs et aux sympathisants, la primaire tente de conjurer le déclin militant, en ouvrant la base de désignation des candidats via une nouvelle offre de participation politique.

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Mais alors qu’il devait régler des problèmes de leadership interne, le mécanisme devient inefficace et peu contrôlable. Encensées naguère pour leurs vertus « démocratiques », les primaires sont alors accusées de tous les maux, et les appareils partisans reprennent le monopole de l’offre électorale (seuls les écologistes conservent un processus ouvert).

Mais une part de la « société civile organisée », ancrée à gauche, récupère l’idée. Elle défend un processus original de désignation, porté par un collectif d’associations et d’intellectuels issus du milieu de la démocratie participative et de la cause environnementale. Le dispositif est alors retourné contre les partis, pour imposer un rassemblement face à une division de la gauche qui ne cesse de s’affirmer depuis 2017 et compromet toute chance d’être au second tour de la présidentielle. L’option proposée est une primaire interpartisane (trancher entre des candidatures pour la plupart issues de plusieurs formations politiques) et non partisane (organisé


[1] Guillaume Gourgues, Vincent Lebrou & Jessica Sainty, « L’essor des listes participatives. Autour de la campagne des élections municipales 2020 », La Vie des idées, 31 mars 2020.

[2] Rémi Lefebvre, « LaPrimaire.org : une démarche citoyenne à l’épreuve des règles du jeu politique »Quaderni, 2020/2 (n° 101), p. 119-138.

 

Guillaume Gourgues

Politiste, Maître de conférences à l'Université Lyon 2

Rémi Lefebvre

Politiste, Professeur à l'Université de Lille 2

Mots-clés

Gauche

Notes

[1] Guillaume Gourgues, Vincent Lebrou & Jessica Sainty, « L’essor des listes participatives. Autour de la campagne des élections municipales 2020 », La Vie des idées, 31 mars 2020.

[2] Rémi Lefebvre, « LaPrimaire.org : une démarche citoyenne à l’épreuve des règles du jeu politique »Quaderni, 2020/2 (n° 101), p. 119-138.