La chercheuse de traces – sur Où vivre de Carole Zalberg
Après chaque acte antisémite en France, depuis plusieurs années, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu appelle les juifs d’Europe à émigrer en masse vers Israël. Un mois après la prise d’otages de l’Hyper Cacher de la porte de Vincennes, en 2015, il avait ainsi réaffirmé qu’Israël accueillerait tous les juifs d’Europe « les bras ouverts ». « Nous disons aux juifs, à nos frères et sœurs : Israël est votre maison et celle de chaque juif ». Ces appels, répétés, s’ils sont favorablement accueillis par une partie de la communauté juive, en irritent profondément une autre. Un des motifs à la fois politiques et moraux les plus souvent invoqués à cet égard, est l’attachement foncier à la France, terre républicaine, où a pu fleurir depuis la Révolution française, cette identité juive si particulière et aujourd’hui un peu oubliée qui a porté le nom d »’israélitisme », promesse républicaine par excellence d’émancipation et d’assimilation non destructrice.

La Seconde Guerre mondiale, qui offre son arrière-plan aux extraordinaires histoires de vie que Carole Zalberg a recueillies, marque une cassure irrémédiable avec ce monde des juifs français d’autrefois. Désormais, la question de savoir, à chaque attentat, à chaque pourrissement de la vie civile et politique, s’il faut partir ou pas, ce qui est la question du rapport difficile de ceux qui sont partis à ceux qui ne sont pas partis, et de ceux qui ne sont pas partis à ceux qui le sont, se pose à chaque fois en des termes plus cruels, plus culpabilisants, jusqu’à paralyser la réflexion. Elle agite ainsi et divise profondément la communauté juive en France depuis la création de l’État d’Israël, plus précisément depuis 1950, soit deux ans après la proclamation d’indépendance, puisque la loi du retour stipule que « tout juif (né d’une mère juive ou convertie au judaïsme et qui ne pratique pas une autre religion) a le droit d’émigrer en Israël ».
Sans point d’interrogation
Il y a, en littérature, bien des façons de s’y