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Les lundis au soleil – à propos de Happy Mondays

Journaliste

Le 31 janvier 2020 seront réédités les œuvres de jeunesse des Happy Mondays, groupe fondamental des rapprochements entre rock et dance-music. Pendant quelques années bénies, un groupe de Manchester inventa ainsi une musique sans frein, sans ordre, qui demeure gorgée de sève et de drogues. Souvenirs personnels d’une furieuse fiesta.

« C’était à quelle adresse, ton appartement de Manchester ? » « Bonsall Street, dans le quartier de Hulme. » « C’était quelle date ? » « Décembre 83, si je me souviens bien. » « Ah oui, ça pourrait bien être nous. Comment ta porte avait-elle été fracturée ? » « Les cambrioleurs l’avaient éventrée à la hache. » « Ah non, désolé, on travaillait plus en finesse. » L’homme avec lequel on tient ce dialogue surréaliste en 1991 n’est pas un de ces célèbres et crâneurs brigands qui peuplent l’imaginaire britannique.

On n’est pas venu dans la banlieue de Manchester pour rencontrer d’authentiques gangsters, comme les frères Kray ou Dominic Noonan. On est venu parler à Shaun Ryder, leader d’un groupe aux allures, au passé et au comportement de gang : les Happy Mondays. Un dicton du Nord anglais affirme que l’on peut extraire un garçon de Manchester, mais jamais extraire Manchester du garçon. Shaun Ryder est un garçon de Manchester. Enfin, de Salford, ce qui est encore pire.

Cette conversation durera des heures, lors d’un entretien tellement riche, drôle intense et sincère que le cinéaste Laurent Perrin nous dira qu’on tenait-là, sans corrections à apporter, le scénario d’un film. Ce n’était pourtant pas du cinéma. Tout était vrai, peut-être même minimisé, dans ce catalogue d’excès. On en est certain : on a assisté à certaines des scènes que racontait Shaun Ryder et sa vision restait systématiquement en dessous de nos souvenirs. Rien d’étonnant à ça : ce qui semblait si extraordinaire pour nous relevait de la routine pour lui. On ne se frotte pas tous les jours à de tels personnages, plus grands que la vie.

La conversation avait démarré sur le parking même du casino désaffecté où les Happy Mondays devaient répéter. Avec des heures, voire des jours de retard. On venait de vanner Shaun Ryder pour le système d’alarme complexe installé sur sa grosse berline allemande. Il répondit par sa propre version des contes et morales. « J’ai appris une leçon quand j’avais 13 ans. On était qu


JD Beauvallet

Journaliste, Critique

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