Mauvaises filles – sur Loin, à l’ouest de Delphine Coulin
Pour certaines, c’est un poids qui ralentit la marche, tandis que pour les femmes de cette famille, c’est une chance : elles se sentent liées à « une longue chaîne de femmes » et s’appuient sur cette hérédité comme sur un roc pour s’élancer vers l’horizon. Du moins c’est ainsi que la romancière Delphine Coulin imagine cette guirlande féminine.
La dernière de la lignée, Octavie, âgée aujourd’hui d’une vingtaine d’années, enquête sur ses aïeules. Derrière elle se cache (à peine) Delphine Coulin, l’autrice de cette saga familiale. À Zélie, à Palmyre, à Georges surnommée Georgette, à Lucie et à Solange, Octavie redonne souffle et chair ; elle comble les silences : « La vie des femmes nécessite encore plus la fiction que la vie des hommes, car on a gardé d’elles peu de récits ou de preuves d’existence. C’est comme si la moitié des pages d’un livre d’histoire avait été effacées. »

Loin, à l’ouest suit cinq femmes d’une même famille. La première est née en 1849. Une trajectoire, celle de Georges, prend le pas sur les autres. C’est celle qu’Octavie raconte dans le détail. Née en 1895, Georgette est le centre à partir duquel partent en étoile celles qui l’ont précédée et celles qui lui succèdent.
Appelée ainsi par sa mère qui souhaite qu’elle ait « une vie d’homme », Georges veut conquérir sa liberté. S’accorder, décrocher la liberté est le fil qui court tout au long du roman. Certaines y arrivent plus aisément que d’autres, parce que l’époque joue davantage en leur faveur. Mais toujours des barrières se dressent car le contexte n’est pas le seul frein : nous sommes nos meilleurs censeurs, nos meilleurs bourreaux.
Georges a vingt-quatre ans en 1919. Elle est veuve et n’a pas d’enfant, mais elle a déjà beaucoup d’aventures à son actif. Pourtant, prévient Octavie : « Peut-être sa vie semblera-t-elle insignifiante à ceux qui aiment les combats et admirent les faits d’armes. Ils me reprocheront de m’intéresser à une figurante, dont les questions de vie ou de mort sont