Art contemporain

L’art quotidien – sur « Marisa Merz. Écouter l’espace »

Historienne de l’art

Refusant la chronologie et parfois aussi un peu, et à raison, la pédagogie, l’exposition monographique consacrée par le LaM à Marisa Merz repose en premier lieu sur une esthétique de la révélation. La découverte de l’œuvre s’accomplira par l’épiphanie, ou pas.

Trente ans tout pile après une importante rétrospective au Centre Pompidou, le LaM de Villeneuve-d’Ascq présente actuellement une exposition monographique de l’artiste italienne Marisa Merz (1926-2019). Sans être confidentielle – auréolée d’un prestigieux Lion d’or à la Biennale de Venise en 2013 – l’œuvre de cette dernière est toutefois moins connue que celle de ses contemporains rassemblés à la fin des années 1960 sous l’étiquette contestable d’arte povera par le critique d’art Germano Celant.

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Si la plupart des artistes de ce courant sont bien représentés dans les collections publiques françaises (notamment au Centre Pompidou et au Musée d’art moderne de la ville de Paris), Merz fait exception : aucune de ses œuvres n’a été acquise par une institution nationale. Souvent définie comme la seule femme du groupe – c’est vrai – ou comme « femme de » – c’est encore vrai, puisqu’elle a épousé Mario Merz en 1960 –, elle a embrassé malgré elle une image publique reliant beaucoup trop spontanément son engagement artistique avec sa condition de femme.

La décision de Celant d’intégrer Marisa Merz à l’arte povera relève-t-elle d’un intérêt sincère, d’un tokénisme désabusé ou d’un achat de paix sociale au sein d’un groupe dans lequel Mario Merz était un des artistes les plus influents ? Faire de l’histoire de l’art n’étant pas s’improviser sibylle, je ne m’engagerai pas dans ces considérations ; en revanche, il paraît important de déraciner temporairement le travail de Marisa Merz de ce contexte dans lequel l’œuvre n’est pas envisagée pour ses qualités propres, mais toujours en comparaison d’autres, et ce pour la sortir des parallélismes parfois stériles.

C’est le parti pris choisi par les trois commissaires de l’exposition, Sébastien Delot, Grégoire Prangé et Andrea Viliani, qui présentent le travail de l’artiste dans un parcours d’une grande sobriété, revenant sur les étapes de la vie créatrice de Merz. Refusant la chronologie et parfois aussi un peu la pédagogie, l


Camille Paulhan

Historienne de l’art, Professeure à l’École nationale supérieure des beaux-arts de Lyon