Histoire

Dix heures avec Freud

Germaniste et critique littéraire

Qui était (vraiment) Sigmund Freud ? Au delà du psychanalyste aux théories fondatrices, quel homme a-t-il été à Londres, Vienne ou encore Freiberg, et quels souvenirs a-t-il laissés derrière lui ? Christine Lecerf revient pour AOC sur « La Grande Traversée » qu’elle consacre à Freud sur France Culture à partir du 30 juillet.

Je ne me suis jamais étendue sur un divan. J’ai toujours « lu » Freud, comme Musil ou Wittgenstein, en savourant ce savant mélange très viennois de science, de philosophie et de poésie. Je connaissais assez peu l’homme, et encore moins le mouvement qu’il a fondé : la psychanalyse. Familière de l’histoire culturelle autrichienne, des grandes études de Schorske, Johnson ou Le Rider, j’avais bien étudié la condition des juifs de culture à Vienne entre 1890 et 1938, et je savais ce qu’il en a coûté à Freud, comme à tant d’autres, d’avoir été un esprit libre et novateur. Les polémiques récurrentes sur la validité des « théories » freudiennes ne m’intéressaient guère. Je considérais peut-être à tort qu’elles relevaient essentiellement d’une guerre de chapelles.

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Quelques mots dans la presse sont cependant venus perturber cette relation purement livresque avec le père de la psychanalyse. En 2013, à l’occasion de la parution en français d’un récit de fiction,  La liste Freud de Goce Smilevski, j’ai en effet lu sous la plume de plusieurs journalistes français que Freud aurait « sacrifié ses sœurs aux nazis » et leur aurait même préféré son « chien ». De tels propos ne me paraissaient pas seulement scandaleux, ils étaient le signe d’une méconnaissance persistante de l’histoire politique et culturelle de l’Autriche et me renvoyaient dans le même temps à la nécessité d’en savoir plus sur cet homme.  Qui était (vraiment) Sigmund Freud ?  Cette question que je m’étais posée à moi-même, il y a cinq ans, il était judicieux de la poser aujourd’hui publiquement. C’était l’intime conviction de Sandrine Treiner, directrice de France-Culture, qui m’a encouragée à partir sur les traces d’un Freud inconnu : j’avais dix heures d’antenne pour lui redonner vie.

Freiberg (Pribor)

Décembre 2017. J’entame mon enquête. Dès l’origine, Freud n’est pas là où je l’attendais. À ma grande stupeur, le père de la psychanalyse n’est pas né à Vienne, mais à 300 km à l’est de la capitale, à Freib


Christine Lecerf

Germaniste et critique littéraire, Productrice à France-Culture

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