Numérique

Ouvrir le code des algorithmes ne suffit plus

Chercheur en sciences de l'information et de la communication

Depuis son arrivée à la tête de Twitter rebaptisé X, Elon Musk a bien tenu sa promesse d’ouvrir certaines parties du code source de la plateforme. Cette réponse à de vieilles revendications militantes pour plus de transparence des plateformes ne manque, en vérité, pas de cynisme. Il est devenu transparent que le code de Twitter favorisait certains contenus et en défavorisait d’autres, au bon vouloir de Musk. L’ouverture du code ne suffit plus, aujourd’hui, pour donner des outils de contrôle à ce que les grandes plateformes font de nos espaces d’expression et de nos démocraties.

C’est un débat qui existe depuis que le web est devenu un média de masse. Celui autour de l’ouverture des algorithmes qui le rendent, pour chacun d’entre nous, traversable, navigable et praticable. Un débat pour comprendre comment fonctionnent les moteurs de recherche et désormais ces « jardins fermés » que sont les médias sociaux. Longtemps les grands acteurs du web s’abritèrent derrière deux arguments, le « secret industriel » d’une part, et l’absence de nécessité d’autre part, au motif que « nous » serions les premiers et les seuls responsables de l’organisation de l’information en ligne, les classements des moteurs de recherche ou les « fils » et autres « murs » des médias sociaux n’en étant que le reflet instrumental. Les Big Tech ne se voulaient qu’hébergeurs et en aucun cas éditeurs.

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Et puis deux choses se produisirent. D’abord le fait que cette ouverture du code devienne un argument sociétal puis politique. Car plus les usages du web se massifiaient, plus les moteurs de recherche et plus les réseaux et médias sociaux devenaient l’essentiel de cette masse, et plus il devenait évident qu’ils avaient une lourde responsabilité dans le choix de ce qu’ils rendaient visible ou invisible. Et qu’il fallait faire quelque chose : « Il est vain de réclamer la dissolution de Google ou d’un autre acteur majeur comme il est vain d’espérer un jour voir ces acteurs « ouvrir » complètement leurs algorithmes. Mais il devient essentiel d’inscrire enfin clairement, dans l’agenda politique, la question du rendu public de fonctionnements algorithmiques directement assimilables à des formes classiques d’éditorialisation. » (Libération, tribune de votre serviteur, 2015)

Personne ne conteste aujourd’hui le rôle que l’éditorialisation algorithmique joue dans l’organisation des informations en ligne et donc dans les débats publics de notre société. Mais ce constat fut long à établir (j’avais avec d’autres, commencé à la souligner dès 2004). Et le temps d’y parvenir, le web et


Olivier Ertzscheid

Chercheur en sciences de l'information et de la communication, Maître de conférences à l'université de Nantes (IUT de La Roche-sur-Yon)