Médias

Macron et les médias : je t’aime, moi non plus

Sociologue

On a beaucoup dit d’Emmanuel Macron qu’il avait été le « candidat des médias » lors de la dernière élection présidentielle, ce qui est certainement exagéré même s’il a bien été l’objet d’un intérêt précoce. Toutefois, alors qu’il a surjoué la distance avec les journalistes, le président de la République entretient désormais une relation dégradée avec une profession qui, si elle ne fait pas l’élection, peut la compliquer sérieusement.

L’élection d’Emmanuel Macron à la présidence de la République, en mai 2017, a souvent été présentée comme le produit de la complicité que les « médias » auraient entretenu à son endroit, de nombreux commentateurs et détracteurs l’ayant volontiers qualifié de « candidat des médias ».

Quel que soit le caractère réducteur de cette analyse/accusation, force est de constater que deux ans après, l’idylle semble bien en voie d’achèvement alors que se multiplient les attaques portant, à la fois, sur la teneur du style présidentiel et sur son mode de traitement des journalistes. Afin de saisir ce qui serait spécifique (ou pas) de la présidence Macron, il n’est pas inutile de revenir ici sur l’instauration de relations à la fois classiques (celles du président de la République avec la presse) et relativement originales, tenant à la fois aux changements du contexte médiatique (la présence croissante des réseaux sociaux sur le travail journalistique) et aux propriétés personnelles et politiques d’Emmanuel Macron.

Un intérêt médiatique précoce

Il semble quelque peu léger d’affirmer que les « médias » se seraient placés au service d’Emmanuel Macron au cours de la dernière élection présidentielle, même si le ministre de l’économie du gouvernement Valls a suscité, très tôt, un intérêt médiatique disproportionné au regard son poids politique initial, relativement modeste. Il existe des explications classiques à cette inclination soudaine : le positionnement politique, clairement « libéral », sur le plan économique, en décalage de l’orientation générale du gouvernement qui lui avait valu des polémiques publiques avec certains de ses collègues d’alors (François Rebsamen, Christian Eckert) et l’avait placé sur le devant de la scène, comme l’a confirmé l’adoption laborieuse et controversée de la « loi Macron », au cours de l’année 2015.

Plus déterminant, l’effondrement dans les sondages d’opinion, comme dans les intentions de vote pour l’élection présidentielle à venir, du président de


Philippe Riutort

Sociologue, Professeur de sciences sociales en lettres supérieures au lycée Henri IV à Paris, enseigne la science politique à l'Université Paris X-Nanterre