Peste et covid-19 : même combat ?
La question peut sembler provocante, pour ne pas dire déplacée. Ni la nature de l’épidémie actuelle causée par un virus là où la peste est provoquée par une bactérie ; ni sa létalité qui, même si elle reste incertaine du fait des doutes sur le nombre de cas recensés, n’en est pas moins très faible au regard de la mortalité due au yersinia pestis dans sa forme bubonique et plus encore pulmonaire, ne rendent a priori ces deux infections comparables. Face à une situation sanitaire exceptionnelle et à la mise en quarantaine de populations à l’échelle de pays entiers, nombre d’historiens, dans les journaux ou sur les ondes, ont toutefois été appelés à donner de la voix pour évoquer l’épidémie de peste, apparue au milieu du XIVe siècle.

De 1347 à 1353, entre le tiers et plus de la moitié de la population européenne a péri : une crise démographique sans précédent, bien supérieure en pourcentage de population, au nombre de morts causés par les épidémies ultérieures de choléra au XIXe siècle, ou de grippe espagnole à partir de l’automne 1918, et dont on parle actuellement tout autant. Considérée alors comme nouvelle et hors norme (on avait en effet oublié une première pandémie, dite « peste de Justinien », survenue dans les années 541-ca 760), la peste est devenue endémique. Compagne de longue durée des sociétés occidentales, elle n’a disparu qu’au XVIIIe siècle, avec un dernier épisode meurtrier à Marseille, en 1720, mais sévit encore au XIXe dans l’Empire ottoman. Une troisième pandémie resurgit en Asie à la fin du siècle et, faut-il le rappeler, la peste reste présente jusqu’à aujourd’hui dans certaines parties du monde, comme à Madagascar, où elle revient périodiquement.
Si la peste et le Covid-19 ne se ressemblent guère, puisque leur nosologie, leur étiologie ou encore leur létalité divergent fortement, on ne peut s’empêcher de lire ici ou là des évocations de la pandémie médiévale, pour en faire, sans solution de continuité, aussi bien un miroir de nos peurs qu’un pré