Politique culturelle

Les artistes au défi du confinement ou la survivance des lucioles

Économiste, Sociologue

L’économie du secteur culturel est caractéristique de ces économies d’externalités généralisées : la valeur ajoutée générée par les activités artistiques est certes loin d’être négligeable mais elle mesure de façon très incomplète la valeur globale produite par ces activités. La crise en cours souligne combien manque un alambic efficace qui fasse remonter une partie de cette valeur vaporeuse jusqu’aux artistes.

Les lucioles ont disparu en cette époque de dictature industrielle et consumériste
où tout un chacun finit par s’exhiber à l’image d’une marchandise dans sa vitrine,
façon de ne pas « apparaître » justement.
Georges Didi-Huberman, Survivance des lucioles, Minuit, 2009, p. 32

 

Les activités artistiques et culturelles, ferments de nos sociabilités, figurent parmi les plus touchées par le confinement de la population. Au premier rang, le spectacle vivant s’est retrouvé durablement en sommeil, ainsi que les visites d’expositions (musées, centres d’art et autres lieux de création), de monuments ou des nombreuses propositions artistiques qui habituellement savent si bien nous interpeller.

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L’éducation artistique et culturelle, auxiliaire curieuse des temps scolaires et périscolaires, a aussi été à l’arrêt. Les artistes, assigné·e·s à domicile, ont dû renoncer aux résidences qui leur offrent habituellement ces temps si précieux de rencontres et de confrontations avec un ailleurs et un autre si proches et, dans ces circonstances, à nouveau devenus si lointains.

Les industries culturelles ont également été lourdement touchées ; les tournages suspendus ; les cinémas, les librairies et les disquaires fermés. Tout ce que ces lieux – qui sont plus que des commerces – rendent habituellement possible et notamment « le plaisir de trouver ce qu’on ne cherchait pas », menace de nous être momentanément confisqué. Et pourtant, 53% des internautes interrogé·e·s placent la consommation de biens culturels en ligne en tête des activités indispensables en période de confinement et 62% des consommateur·trices de biens culturels déclarent en consommer plus qu’avant le confinement selon le baromètre Hadopi (Haute autorité pour les diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet) sur les pratiques culturelles à domicile en période de confinement.

Comme c’est souvent le cas, les activités culturelles et artistiques offrent un effet de loupe sur les enjeux de la crise éco


Dominique Sagot-Duvauroux

Économiste, Professeur à l'Université d'Angers

Grégory Jérôme

Sociologue, Responsable de la formation continue à la Haute école des arts du Rhin