Le handicap, enjeu de justice sociale
Deux événements ont récemment sorti la question du handicap des couloirs du ministère des Affaires sociales et confirmé ce que les mobilisations des Gilets jaunes, en réunissant une proportion importante de personnes handicapées, avaient déjà montré : le handicap est un enjeu de justice sociale, à l’intersection notamment des enjeux de genre, de race et d’inégalités sociales.

Se saisissant de l’opportunité offerte depuis le mois de janvier 2020, une pétition demandant le réexamen des conditions d’éligibilité à l’allocation adulte handicap (AAH) a été déposée sur le site du Sénat [1]. Cette pétition a dépassé le seuil requis des 100 000 signatures (108 627) pour être inscrite à l’ordre du jour des échanges sénatoriaux. Contre l’avis de Sophie Cluzel, secrétaire d’État aux personnes handicapées, le Sénat a adopté une proposition de loi dans ce sens et l’a renvoyée vers l’Assemblée nationale qui devra trancher le 17 juin prochain.
C’est d’abord la question posée qui importe : ce minimum social doit-il être calculé en fonction des revenus du conjoint, rendant ainsi dépendante la personne handicapée de ce dernier, ou faut-il individualiser cette prestation, pour en faire une ressource propre ?
Cette question est celle, plus large, de la déconjugalisation des prestations sociales. Ceci explique peut-être que cette pétition ait rencontré un tel succès, bien au-delà du monde du handicap, alors qu’elle porte sur une allocation qui n’a jamais concerné que celles et ceux qui franchissent les portes d’une Maison départementale des personnes handicapées pour demander la reconnaissance administrative de leur incapacité à travailler.
Des féministes – handicapées ou non – se sont alliées à cette mobilisation, indignées d’une mesure entraînant une dépendance conjugale, économique, relationnelle et psychologique, spécialement à risque pour les femmes qui sont les victimes des violences conjugales, et plus encore pour les femmes handicapées qui subissent davantage de violenc