Société

Pour une sociologie du mépris de classe

Sociologue, Sociologue

L’expression « mépris de classe » est de retour dans le champ politique et médiatique, souvent instrumentalisée par les partis populistes pour sa fonction d’anathème : celui à qui on l’applique est disqualifié car coupable, par ses propos ou son attitude, d’avoir trahi un certain idéal démocratique où, tous étant égaux, nul ne devrait être méprisé. Une sociologie du mépris de classe s’avère donc plus que jamais nécessaire pour expliquer et comprendre ce qui se joue dans les occasions réelles de domination où il se constate et, par suite, dans l’usage qui est fait de cette catégorie.

Dans la réplique brutale d’un responsable politique pris au dépourvu devant la question gênante d’un journaliste, dans l’exigence hautaine d’un client mécontent d’un grand hôtel parisien ou dans le dédain d’un chirurgien de renom devant l’un de ses personnels soignants… le mépris de classe peut se rencontrer ou se surprendre sur des scènes sociales en apparence très variées.

Pour le sociologue, se proposer d’en rendre compte, de l’analyser ou de le penser suppose sans doute d’abord de se faire ethnographe, observateur attentif des interactions, et plus particulièrement de celles qui mettent en présence – directement ou indirectement – des acteurs sociaux issus de milieux ou de positions décalées voire opposées.

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Mais on ne saurait se contenter de ce seul « relevé d’observations » ou de la seule thématisation d’une opposition entre des élites et des catégories défavorisées. Le sociologue n’est pas un moraliste et s’il s’agit de comprendre et d’expliquer les faits sociaux « comme des choses », il faut tout à la fois mettre au jour les mécaniques qui expliquent sa survenue et rendre compte des effets qu’il produit.

Commentant ou désignant ouvertement la sortie inattendue d’une personnalité publique, l’expression est, depuis quelque temps déjà, convoquée par certains discours politiques, ou certains débats médiatiques. Le mépris de classe y fonctionne un peu comme un anathème : le discours de celui à qui on l’applique est disqualifié sur un terrain souvent plus moral que politique : celui qui, par ses formules déplacées est ainsi visé par l’opprobre, s’est rendu coupable d’un manquement au devoir de respect dû à chacun, ou plus largement de trahison d’un certain idéal démocratique où tous étant égaux, nul ne devrait être méprisé.

Dans ce cadre, l’expression désigne en effet souvent des paroles ou des gestes traduisant une abusive dénégation de la réalité et de la valeur sociale de ceux qui sont méprisés. Elle permet donc pour l’essentiel de stigmatiser celui qui, parfois malgré lui, s’est rendu coupable d’une telle attitude ou d’un tel jugement, et avec lui ses « semblables » qui, par extension, seraient tous porteurs de ce « mépris de classe ».

Plusieurs « petites phrases » mises en exergue dans l’espace public et médiatique en donnent un bonne illustration : certains hommes politiques, qui à travers des expressions comme « racailles », « sans dents » ou « illettrés », identifient « ceux qui ne sont rien » et participent à renouveler les formes de stigmatisations morales accolées aux classes populaires par les classes supérieures ; de même des dirigeants économiques qui justifient, par exemple, les mesures de précarisation de l’emploi ou les licenciements par une nécessité que le commun des mortels, et en particulier ceux qui sont concernés par ces mesures, ne seraient pas en capacité de comprendre, faute d’éducation ou de positionnement idéologique.

L’usage politique de l’expression « mépris de classe » par les partis dits « populistes » – au sens précisément où ils jouent de l’opposition entre le peuple et les élites comme d’un allant de soi –, que ce soit aux États-Unis avec Donald Trump ou en France avec le Rassemblement National, permet de mieux comprendre la dimension opportuniste de ces occurrences : l’expression n’y désigne pas tant la résurgence du lexique des classes sociales dans le discours politique qu’une posture visant à exploiter une défiance à l’égard des élites ou des puissants.

Une telle posture n’exige donc aucune analyse ou remise en cause des rapports sociaux de classe : en France, la stratégie du RN consiste ainsi à s’approprier utilement l’expression pour mieux répondre au sentiment d’humiliation d’une fraction des classes populaires, mais aussi des classes moyennes fragilisées par la mondialisation. Marine Le Pen se pose ainsi en porte-drapeau de « ceux d’en bas », incarnant par-là la voix politique qui résiste à « la condescendance de classe » des nantis. Isaac William Martin [1] signalait déjà chez Donald Trump cette capacité à adopter cette posture rhétorique de défiance envers les classes dirigeantes dans laquelle s’est retrouvée une large fraction des classes populaires blanches américaines.

Quoiqu’il use éventuellement des mêmes termes – ici de la même expression –, c’est bien sûr sur un tout autre registre que se déploie le travail sociologique.

Le travail collectif engagé par des chercheurs aux terrains diversifiés a eu pour objectif de proposer une sociologie du mépris de classe, c’est-à-dire à la fois d’expliquer et de comprendre ce qui se joue dans les occasions où il se surprend ou se constate et, par suite, à travers l’usage de cette catégorie [2].

Expliquer, en montrant les dimensions structurantes à l’œuvre dans la production de comportements méprisants, ainsi que dans la réception de ceux-ci : le mépris de classe est produit dans des situations d’asymétrie des positions et s’inscrit dans des rapports sociaux de domination. Comprendre ensuite, en insistant sur le registre des affects, de la défiance, de la peur ou de la honte, avec tout ce qu’ils peuvent comporter de traductions corporelles qui ne sont pas toujours exprimables sous forme de discours (gêne, larmes aux yeux, tremblement, rougissement, etc.) chez ceux qui subissent le mépris.

Le mépris de classe, un événement dans un monde sans conflits ?

Quelles sont les raisons de la persistance de ce mépris de classe : alors que, d’une certaine manière, tout est fait pour le taire, que tout incite à en faire l’économie ou, à tout le moins, à ne pas le laisser voir, comment comprendre que certaines occasions continuent de provoquer son expression ?

Ainsi dans le monde du travail, caractérisé par des formes institutionnalisées de domination, par des relations fortement hiérarchisées, fondées sur un régime d’autorité dont le principe en tant que tel n’est pas remis en cause (dans l’entreprise, les rapports de domination apparaissent comme légitimes), le mépris de classe semble superflu : les uns décident, les autres obéissent ou appliquent, selon des règles, des normes, des positionnements et des hiérarchies qui pour être essentiellement sociales, culturelles ou langagières demeurent très peu contestées ; le plus souvent les dominants n’y ont guère de raison, d’asseoir ou de justifier leur domination. Elle y apparait comme un allant-de-soi, comme un fait que l’on naturalise à force de faire mine de l’oublier.

Pourtant tout se passe comme si, à la faveur de certaines interactions, à travers un geste, une parole ou encore une attitude corporelle, le mépris de classe – exprimant un ferme rappel du rapport de classe – trouvait néanmoins à se manifester. Au-delà de sa violence ostensible, le mépris de classe a en quelque sorte pour effet de rappeler l’ordre établi, de rappeler les hiérarchies, d’en montrer toute l’ampleur pour mieux déconsidérer ou décourager toute tentative de les réduire.

Ceux qui sont en situation d’être dominés dans les rapports sociaux ordinaires sont en grande partie dépendants des jugements des groupes sociaux qui ont la capacité à produire les normes sociales légitimes. Or, en soulignant brutalement aux victimes leur vulnérabilité, leur absence de maîtrise du sens de leur vie, leur difficulté à contrôler les images dévalorisantes dont ils font l’objet, le mépris de classe produit un événement où l’ordre ordinaire de la domination est perturbé : à la suite d’une remise en cause ou d’une nouvelle fragilité, la domination devient soudain plus incertaine, moins légitime ; et ce rapport de force qui n’était qu’implicite, qui semblait tant aller de soi qu’on pouvait le laisser caché, devient tout à coup éclatant.

Paradoxalement, la brutalité de son expression entraine ainsi presqu’immédiatement une prise de conscience de l’intériorisation et de la naturalisation de la domination sociale. Compris dans ce rapport de forces mouvant, l’expression du mépris de classe n’est autre que la réaction du dominant inquiet de voir les frontières qui protègent son pouvoir s’affaiblir ou s’estomper.

Mépris de classe et structure sociale

Ainsi, pour que ce mépris ait une efficacité, il doit s’adosser à des ressources sociales objectives qui placent celui qui méprise dans une position statutairement dominante. La théorie de la stratification sociale qui lui est inhérente s’inscrit ainsi dans une analyse des rapports de force dans laquelle les luttes symboliques et économiques « coexistent toujours dans la réalité (en des proportions différentes selon les sociétés et selon les classes sociales d’une même société) [3] ».

Cependant, si le mépris de classe renvoie à la structure sociale, il heurte d’abord une dignité personnelle, vécue ou revendiquée. Le social s’incarne alors dans l’individuel ; avec lui, la lutte des classes se déploie sur les scènes quotidiennes, tant publiques que privées, et les affects y inscrivent leur puissance potentiellement destructrice.

Pour ceux qui en sont la cible, le mépris survient parfois de façon d’autant plus brutale que tant d’efforts de la vie quotidienne tendent vers la respectabilité. C’est bien sûr au mépris de classe des élites politiques que l’on pense d’emblée. Lorsque celles-ci s’auto-désignent comme des « premiers de cordées », aveuglées par leur « inconscient de classe [4] » au point d’en venir à une « philosophie du mépris [5] », elles peuvent être amenées à considérer les ouvriers de l’abattoir breton Gad comme des « illettrés », à voir les gares comme des lieux « où on croise des gens qui réussissent et des gens qui ne sont rien » ou le mouvement des Gilets jaunes comme « un mouvement de beaufs ».

Envisager les situations qui mettent en jeu la dépréciation de la valeur sociale de certains agents suppose de considérer l’ensemble des ressources sociales dont ils peuvent ou non disposer. Ainsi le mépris de classe est indissociablement encastré dans la question de la valeur des individus et de leurs caractéristiques, sachant qu’une propriété donnée (la classe, le genre, l’appartenance territoriale, migratoire ou ethnique, générationnelle…) ne vaut rien par elle-même. C’est dans la complexité des situations et la dialectique entre le capital détenu et l’efficacité symbolique de ce capital que se perçoit à la fois la capacité des agents à agir, leur résistance ou leur incapacité à ne pas être agis par d’autres plus dotés ou plus légitimes et les arrangements qu’ils mettent en place avec les contraintes qui les enserrent.

Le mépris de classe comme émotion de classe

Les effets de cette disqualification sociale se perçoivent dans le traumatisme qu’elle peut engendrer chez ceux qui la subissent. Ce sont d’ailleurs ces effets qui permettent de désigner le caractère méprisant d’une parole ou d’un comportement, la réception douloureuse d’une insulte, d’une moquerie, d’un oubli, d’un silence, d’une punition ou d’un blâme. L’intérêt de la catégorie de « mépris de classe » est qu’elle oriente la focale sur les affects et traite avec une grille analytique des données qui n’apparaissent qu’à la marge, souvent sous une forme descriptive ou, parfois, psychologique et, ce faisant, en y perdant la dimension structurelle inscrite dans le fondement même des rapports sociaux.

C’est en ce sens que le mépris de classe peut être entendu comme une forme de régulation des schèmes socio-affectifs – ces représentations ou catégories par lesquelles nous pensons et nous vivons les réalités sociales : il survient dans le cadre d’une interaction qui présente un déficit de normes, il répond à une inadaptation de l’ordre des choses, et plus particulièrement à une contrariété dans les logiques de domination.

Si, dans les analyses des émotions de classes, l’on se tourne volontiers vers ceux qui sont disqualifiés, on accorde souvent moins d’importance ou d’attention aux affects de ceux qui produisent plus ou moins activement – mais pas nécessairement consciemment – du mépris. Or comme le rappelle Claude Grignon [6], « les dominants aussi “ont la haine”… ».

Dans l’expression et la réception du mépris, il y a une face verbale et une face non-verbale : une dimension émotionnelle qui s’exprime dans et avec les corps. À chaque fois, c’est le corps qui parle : le mépris de classe n’est pas le fait d’une réaction consciente ou délibérée, mais plutôt un « état de corps [7] », une réaction du corps du dominant à une situation qui met en cause sa légitimité et sa position. Comme une image inversée, il faudrait en somme voir le mépris de classe comme la manifestation d’un habitus dominant dans lequel, c’est d’abord le corps qui agit ou réagit.

Mais, ce qui se révèle à l’occasion de cette expression spontanée qui échappe au contrôle est précisément ce qui habituellement demeure caché : « retour du refoulé », dirait-on dans un registre psychologique ; le mépris de classe est l’extériorisation inattendue, mais irrépressible d’une posture totalement intériorisée et continuellement présente, mais qui dans les rapports de domination ordinaires n’a nul besoin d’être exprimée…

Le mépris, en tant qu’émotion de classe, se matérialise dans les représentations que les classes dominantes se font des classes populaires (ou celles que les fractions de la petite bourgeoisie, voire des classes populaires relativement stabilisées, se font des fractions plus dominées qu’elles) à la fois dans le langage quotidien et dans celui plus élaboré des journalistes, des écrivains et des intellectuels.

Ainsi sociologiser le mépris de classe permet d’analyser les rapports de classe « au ras du sol [8] ». Ces manifestations publiques ou privées, explicites ou exprimées dans un simple geste négligent ou un regard hautain, sont des « traces parfois infinitésimales [qui] permettent d’appréhender une réalité plus profonde [9] »: le caractère éminemment émotionnel des logiques et des procédures de domination [10].

Mépris de classe et processus de stigmatisation

Raisonner en termes de valeur et de morale de classe donne à voir comment des groupes stigmatisés vivent et composent avec des stéréotypes (le genre, l’appartenance territoriale, migratoire ou ethnique, générationnelle) qui se combinent, se superposent et s’articulent avec la dimension hiérarchisée des rapports de classe, y compris lorsque cette dernière est largement euphémisée, voire déniée dans la compréhension qu’en ont les agents sociaux.

Penser le mépris de classe, c’est aussi le saisir dans sa dimension genrée. Ainsi Beverley Skeggs révèle que le terme de « classes populaires », lorsqu’il désigne des femmes, les dévalorise doublement en les associant à la saleté, au danger et à l’absence de valeur. Leur adhésion à la figure de la personne dévouée et responsable est une façon de se rendre « respectables » et de déjouer cette double assignation dépréciative tout en se conformant à ce qu’elles pressentent de la représentation légitime de la femme respectable, telle que la conçoivent les classes supérieures. Comme elle le souligne, « la classe sociale est rarement explicite mais toujours présente : c’est une absence structurante [11] ».

De même, le mépris de classe s’articule parfois explicitement, d’autres fois de façon cachée, avec le discours raciste. Ainsi dans une enquête menée par Pierre-Emmanuel Sorignet [12], des ouvrières syndiquées sont accusées de racisme par de jeunes intérimaires dont la direction a pris le parti au nom d’un antiracisme opportuniste qui permet de mettre à mal les solidarités et les résistances de ces anciennes face à l’introduction de nouvelles normes de productivité. L’enquête montre que, derrière ces accusations de racisme, il faut reconstruire l’histoire des conditions de travail, des impératifs managériaux, des formes d’emploi, des lieux d’habitat, des visions du monde et des convictions religieuses ou laïques, différenciées selon la génération, comme c’est le cas dans nombre de situations de la vie ordinaire, si bien que tout est plus complexe qu’une simple interprétation en termes de discrimination raciale.

L’enquête met ainsi en lumière une situation où, instrumentalisé, le registre des discriminations est davantage ajusté au discours managérial contemporain que celui des inégalités sociales.

De même dans l’univers sportif, les locutions racistes proférées dans certains contextes d’interactions n’épuisent pas la réalité sociale et surtout l’ambition interprétative que doit tenir le sociologue. Pour les Blacks du club de foot analysé par Frédéric Rasera [13] ou les insultes racistes proférées dans une bagarre à l’issue d’un match amateur observées par Cyril Nazareth [14], la race est un vocabulaire de repérage qui se réfère à la couleur pour exprimer tantôt des goûts, des habitudes ou une façon d’être, supposés propres aux « Noirs » ou aux « Arabes », tantôt une communauté de couleur, tantôt une appartenance territoriale, qui dans les faits n’existent guère. Ainsi, quoiqu’indéniable et parfois pénible pour ceux qui le subissent, le discours raciste en milieu populaire n’épuise pas l’interprétation sociologique et ne peut se réduire aux analyses trop unilatérales des entrepreneurs de morale.

Tout l’enjeu du travail sociologique consiste sans doute à ne pas limiter l’analyse aux représentations ou aux discours que tiennent les agents sociaux, mais plutôt à s’efforcer de les réinsérer dans les usages pratiques que ces mêmes agents en font. Cette ambition épistémique oblige à ne pas restreindre l’enquête au seul « ressenti » de ceux qui subissent le « racisme », mais à l’étendre à l’observation, à la contextualisation et à l’historicisation des pratiques des différents protagonistes, tant de ceux qui sont désignés ou auto-désignés comme « victimes » que de ceux qui sont identifiés comme producteurs. La description fine et symétrique de ce à quoi l’ethnographe assiste, gage de généralisation, évite au chercheur de mettre trop facilement en scène ses propres préjugés moraux et de rejouer sous de nouvelles modalités l’opposition scholastique entre le savant et le politique.

L’appropriation par l’extrême droite de la locution de « mépris de classe » est sans doute l’une des traductions de sa volonté de conquête d’un électorat populaire ; mais ces nouveaux emplois doivent aussi nous interroger sur la façon dont les questions des inégalités sociales, de la redistribution, de l’égalité et de la propriété se sont estompées, en particulier à gauche, au profit de la lutte contre les discriminations.

Comme le montrent les récents travaux de l’équipe menée par Thomas Piketty, les « blancs » des classes populaires en Europe, lorsqu’elles votent, s’orientent plutôt vers l’extrême droite ; et le RN, en France, en a largement bénéficié. De même qu’elle a largement disparu du monde du travail, l’analyse « classiste » du monde social s’est en partie estompée au profit d’une lecture sans doute beaucoup plus morale consistant à mettre au-devant de la scène les discriminations de genre et celles qui font de la race le vecteur explicatif des stigmatisations.

Sans qu’il s’agisse d’en négliger la force ou parfois le caractère privilégié, notre travail de chercheurs s’inscrit classiquement dans une nécessaire réinscription des discriminations dans des logiques de rapports de classe toujours et encore à l’œuvre. Norbert Elias, brièvement sioniste, scella son engagement dans les sciences sociales en sociologisant les discriminations subies par les juifs dans les années 1930, par leur réinscription dans des logiques d’affrontement entre fractions de classe, montrant que les plus antisémites étaient toujours situés dans l’espace social un peu en dessous ou un peu au-dessus des immigrés juifs d’Europe centrale en mobilité sociale ascendante. La menace de déclassement violent que représentait, en temps de crise, cette communauté juive, pour des allemands des classes moyennes supérieures explique, pour une bonne part, le réflexe de rejet et l’adhésion rapide de ces derniers à des discours racistes.

Enfin, adopter une telle démarche, c’est aussi assurément, donner des outils pour combattre politiquement le mépris de classe et toutes les formes de discriminations qui trop souvent l’accompagnent.

 

NDLR :  Pierre-Emmanuel Sorignet a co-dirigé avec Nicolas Renahy Mépris de classe, l’exercer, le ressentir, y résister (Éditions du Croquant, 2021), ouvrage auquel Nicolas Spire a contribué.

 


[1] Isaac William Martin, « Redneck blues », La vie des idées, 2016.

[2] C’était l’objectif d’un travail au long cours associant un collectif de chercheurs qui a produit un numéro récent de la revue Sociétés contemporaines (déc. 2020) et un ouvrage collectif : Nicolas Renahy, Pierre-Emmanuel Sorignet, (co-dir), Mépris de classe, l’exercer, le ressentir, y résister, Éditions du Croquant, 2021.

[3] Pierre Bourdieu, Alain Darbel, L’amour de l’art. Les musées d’art européens et leur public, 1971.

[4] Bernard Lahire, « Macron et ses petites phrases : “C’est de l’inconscient de classe” », Les Inrockuptibles, 10 décembre 2018.

[5] Bernard Pudal, « Une philosophie du mépris », Le Monde diplomatique, mars 2019.

[6] Claude Grignon, « Le mépris de classe : pratiques et représentations », in N. Renahy, P-E. Sorignet, (co-dir), Mépris de classe, l’exercer, le ressentir, y faire face, Éditions du Croquant, 2021.

[7] Pierre Bourdieu, Le sens pratique, Éditions de Minuit, 1980, p. 115.

[8] Jacques Revel, « L’histoire au ras du sol », préface de l’édition française de Giovanni Levi, Le pouvoir au village. Histoire d’un exorciste dans le Piémont du XVIIe siècle, Paris, Gallimard, 1989.

[9] Carlo Ginzburg, « Signes, traces, pistes. Racines d’un paradigme de l’indice », Le Débat, n° 6, 1980, p. 12.

[10] Voir Nicolas Renahy, Pierre-Emmanuel Sorignet, « Pour une sociologie du mépris de classe. L’économie des affects au cœur de la domination », Sociétés contemporaines, 2020/ 3.

[11] Beverley Skeggs, Des femmes respectables. Classe et genre en milieu populaire, Agone, 2015 [1997], p. 145-196.

[12] Pierre-Emmanuel Sorignet, « Racialisation des rapports sociaux et mépris de classe », in N. Renahy, P-E. Sorignet, (co-dir), Mépris de classe, l’exercer, le ressentir, y faire face, Éditions du Croquant, 2021.

[13] Fredéric Rasera, Le « problème des Blacks ». Sur le « racisme » dans le football –professionnel in N. Renahy, P-E. Sorignet, (co-dir), Mépris de classe, l’exercer, le ressentir, y faire face, Éditions du Croquant, 2021.

[14] Cyril Nazareth, « « C’est vous les racailles ! ». Faire face au déni de respectabilité », Sociétés contemporaines, 2020/3 (N° 119), p. 89-114.

Pierre-Emmanuel Sorignet

Sociologue

Nicolas Spire

Sociologue, codirecteur du cabinet Aptéis

Notes

[1] Isaac William Martin, « Redneck blues », La vie des idées, 2016.

[2] C’était l’objectif d’un travail au long cours associant un collectif de chercheurs qui a produit un numéro récent de la revue Sociétés contemporaines (déc. 2020) et un ouvrage collectif : Nicolas Renahy, Pierre-Emmanuel Sorignet, (co-dir), Mépris de classe, l’exercer, le ressentir, y résister, Éditions du Croquant, 2021.

[3] Pierre Bourdieu, Alain Darbel, L’amour de l’art. Les musées d’art européens et leur public, 1971.

[4] Bernard Lahire, « Macron et ses petites phrases : “C’est de l’inconscient de classe” », Les Inrockuptibles, 10 décembre 2018.

[5] Bernard Pudal, « Une philosophie du mépris », Le Monde diplomatique, mars 2019.

[6] Claude Grignon, « Le mépris de classe : pratiques et représentations », in N. Renahy, P-E. Sorignet, (co-dir), Mépris de classe, l’exercer, le ressentir, y faire face, Éditions du Croquant, 2021.

[7] Pierre Bourdieu, Le sens pratique, Éditions de Minuit, 1980, p. 115.

[8] Jacques Revel, « L’histoire au ras du sol », préface de l’édition française de Giovanni Levi, Le pouvoir au village. Histoire d’un exorciste dans le Piémont du XVIIe siècle, Paris, Gallimard, 1989.

[9] Carlo Ginzburg, « Signes, traces, pistes. Racines d’un paradigme de l’indice », Le Débat, n° 6, 1980, p. 12.

[10] Voir Nicolas Renahy, Pierre-Emmanuel Sorignet, « Pour une sociologie du mépris de classe. L’économie des affects au cœur de la domination », Sociétés contemporaines, 2020/ 3.

[11] Beverley Skeggs, Des femmes respectables. Classe et genre en milieu populaire, Agone, 2015 [1997], p. 145-196.

[12] Pierre-Emmanuel Sorignet, « Racialisation des rapports sociaux et mépris de classe », in N. Renahy, P-E. Sorignet, (co-dir), Mépris de classe, l’exercer, le ressentir, y faire face, Éditions du Croquant, 2021.

[13] Fredéric Rasera, Le « problème des Blacks ». Sur le « racisme » dans le football –professionnel in N. Renahy, P-E. Sorignet, (co-dir), Mépris de classe, l’exercer, le ressentir, y faire face, Éditions du Croquant, 2021.

[14] Cyril Nazareth, « « C’est vous les racailles ! ». Faire face au déni de respectabilité », Sociétés contemporaines, 2020/3 (N° 119), p. 89-114.