Divagations – sur les Rencontres de la photographie d’Arles
Je ne peux m’empêcher de superposer des scènes de films à ma propre vie. Ainsi de la descente en Arles au tout début juillet, pour les Rencontres de la photographie, qui me met invariablement à l’esprit quelques scènes, pins parasols ou stations-services braconnées dans le Pierrot le fou de Jean-Luc Godard. C’est vrai qu’il y a un parfum d’aventures en Arles à ce moment-là. On sait que l’on va découvrir, rencontrer, rire, être ému…

Arles, c’est le délice de la répétition – mais selon un rituel où tout change. Et cette année, Arles s’offrait une sacrée nouveauté : l’achèvement de la tour de la Fondation Luma, confiée à l’architecte américain Franck Gehry. Depuis le temps qu’on en parlait, et qu’on la voyait s’élever sans qu’elle touche, malheureusement, le ciel… Il y eut, semble-t-il, beaucoup d’hésitations, beaucoup d’allers-retours.
Cet écrin pour la collection de Maya Hoffmann, dont on a pu mesurer l’étendue au fil des années, lors d’expositions de préfiguration, est environné d’un élégant parc paysager. Des herbes hautes, des talus, des étendues d’eau. À les regarder, je repense aux années pionnières. Les Rencontres s’étaient installées, sous l’impulsion du charismatique François Hébel, dans les ateliers de la SNCF (qui auraient pu finir sinon, dit-on, en centre commercial !).
Il fallait s’armer de courage pour traverser le sol caillouteux comme un désert brûlant qui sépare les différents ateliers. Ce n’est pas pour dire, mais le bâtiment de Gehry a un petit air de tour tordue. Comme si, en vrillant sur elle-même, elle avait fait éclater sa masse de verre. Montagne aux singes (comme celle bâtie dans les années trente pour le zoo de Vincennes) ? Ou, plus flatteur, bloc de roche, de quartz peut-être, surgi comme un magma soudain refroidi, avec ses facettes polies sur une structure torturée ? Quoi qu’il en soit, c’est un sémaphore dans le paysage. Visible, comme autrefois un clocher d’église, depuis Fontvieille ou depuis la Camargue.
À coup sûr, les années