Un peuple des femmes s’unit contre la guerre
Peut-être faut-il, pour analyser les guerres, les comprendre à la fois comme des guerres de haute intensité déclarées par des nations cheffées par des hommes à d’autres nations selon un principe de viol de souveraineté aux accents masculinistes si évidents que ce n’est même pas la peine de le rappeler. Mais, les guerres sont aussi de basse intensité contre les femmes, du territoire ennemi et de son propre territoire, si l’on en juge par tous ces exemples historiques (les Coréennes pour les Japonais, les Allemandes pour les Russes). Les femmes devinrent le corps vulnérable de la population à envahir et à prendre tout autant que l’élément de réconfort enrôlé au service des hommes qui peuvent, par l’habit de soldat, violer souvent de façon impunie. N’était-ce d’ailleurs pas là l’un des traits que ce paysan devenu soudainement soldat évoque comme l’un des gains de la guerre dans Les Carabiniers de Godard en 1963 ?
La Russie fait la guerre à l’Ukraine et cette invasion d’un pays proche, indépendant et souverain, où se mélangent les langues ukrainienne et russe, possède quelque chose d’irreprésentable tant nous sommes au bord de l’humain. Mais précisément, cet irreprésentable, ce bord de l’humain, c’est la souveraineté mâle qui le performe en s’exhibant dans son plus pur attribut, la guerre. La guerre contre un pays, en jetant les populations civiles au fond des métros, fait malheureusement rimer la nation et le patriarcat le plus hard.
De fait, cette hostilité à l’égard d’une Ukraine démocratique, qui regarde vers l’Union européenne et l’Amérique du Nord, a pu être annoncée de la manière la plus crue par une allusion au viol dans une formule pétrifiante lors de la conférence de presse que Vladimir Poutine a tenue avec Emmanuel Macron le 8 février 2022. Diagnostiquant que le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, s’était montré critique à l’égard du plan de paix à l’Est de l’Ukraine négocié en 2015 entre Kiev et Moscou, Poutine avait fait cette blague tout de suite remarquée et commentée : « Que ça te plaise ou non, ma jolie, faudra supporter ». Cette formule, une fois traduite, avait été perçue par de nombreux observateurs comme un appel à la culture du viol : que tu y consentes ou non, cela va se passer comme cela. De manière explicite, l’Ukraine était présentée comme une fille qui n’a pas besoin de consentir, une jolie terre à annexer, à prendre ou à violer. Le décor était campé comme cela a été maintes fois rapporté depuis.
Comme l’écrit Anna Dovgopol, militante féministe ukrainienne, l’invasion russe est « viriliste »[1], tant le maître du Kremlin ne supporte pas que l’Ukraine lui échappe, vive sa propre vie, oubliant qu’il s’agit d’un pays souverain de 47 millions d’habitants. Désormais, la guerre, outre le rapport d’infériorité de l’Ukraine que Poutine a voulu camper, ne déroge pas à son lot de démonstrations masculinistes. Le traitement de la guerre est habité par la supériorité supposée des hommes comme il en va généralement du cadre narratif dominant des guerres dont les formats de visibilité produisent des schémas d’appréhension de la réalité[2]. Les images sorties des chaînes de télévisions ou des réseaux sociaux montrent les hommes les armes à la main, prêts au combat et les femmes en pleurs, paniquées ou s’occupant des enfants et des vieilles personnes. D’ailleurs, on insiste sur le fait que les Ukrainiens qui fuient la guerre vers la Moldavie ou la Pologne se composent d’enfants et de femmes principalement, ou de personnes âgées dont les attributs de la virilité tendent précisément à être effacés. Une narration se diffuse enfermant chaque sexe dans une division sociale de genre.
Le pouvoir fait guerre, il fait mal et il fait le mâle. Quelle fut l’une des mesures les plus révélatrices de l’ère Poutine ? La dépénalisation des violences domestiques votée comme un seul homme par les députés, sous le haut patronat du pouvoir et de l’église orthodoxe le 25 janvier 2017 à 385 voix pour et 2 contre, au motif que la pénalisation de ces violences risque de faire exploser la famille….
Il est incontestable que la Russie de Poutine fait cohabiter dans les couloirs d’un pouvoir sans partage des militaires, des oligarques et des agents secrets, tous des hommes, qui « ont » toutefois des femmes, des enfants et des maîtresses, lesquels n’apparaissent jamais dans la mise en scène de la souveraineté politique, sauf à servir de dames de compagnie de Poutine, comme dans une vidéo du 6 mars où on le voit entouré de femmes pilotes et hôtesses de l’air autour d’une table recouverte de fleurs, prenant le thé avec elles, alors que son aviation bombardait l’Ukraine.
Ludmila Petrouchevskaïa, écrivaine russe, écrit dans une lettre ouverte publiée par Mediapart le 4 mars 2022 que, pendant la seconde guerre mondiale, les femmes étaient là : fières d’être pauvres, elles « ont tout donné pour protéger le pays sur le front intérieur. Toutes leurs douleurs et leurs souffrances se sont retrouvées dans mes livres et mes pièces de théâtre. Maintenant, la Russie maternelle a été écrasée, molestée. Les généraux de Poutine l’ont violée et détruite en envoyant les fils du pays dans cette guerre cruelle et odieuse, la guerre contre nos parents, nos frères et nos sœurs, contre l’Ukraine bien-aimée et natale ». Et elle ajoute : « Dans cette guerre, je condamne un des principaux criminels : Poutine ».
Quelle est cette Russie maternelle que le claquement des bottes actuelles a fait disparaître? Est-ce celle des mères qui prennent la voix pour réclamer leurs fils disparus comme les mères de la place de Mai en Argentine au moment de la dictature ? Est-ce celle des femmes qui travaillaient aux côtés des hommes quand la guerre pouvait être considérée comme juste ? A-t-elle d’ailleurs vraiment existé cette Russie maternelle ?
On peut dire en tout cas que c’est au nom d’un nationalisme viriliste taché de sang que Poutine envahit l’Ukraine, laquelle aurait justement quelque chose de maternel en elle à travers des femmes ukrainiennes prêtes à protéger leur pays, fières d’être pauvres mais auprès des attaqués, des blessés, des sans grades. On sait que les guerres fabriquent toujours une invisibilité des femmes : alors même qu’elles participent à l’effort de guerre et à la préservation des vies, on ne les voit ni dans les combats, ni dans les règlements des conflits. Elles sont absentes de toutes les photos officielles. Où sont les femmes dans ce conflit ? Il est à craindre que la seule réponse médiatique admissible soit alors la division du travail en Ukraine entre les femmes pourvoyeuses de soin, cachées dans les sous-sols des métros avec leurs enfants et les hommes pourvoyeurs d’armes, luttant de façon virile et intrépide. Comment une guerre pourrait-elle ne pas échapper à cette dichotomie de genre tant la guerre n’est possible que par la mise au pas des femmes par les hommes ?
Comme dans toutes les guerres, les femmes sont plus facilement victimes : elles possèdent moins d’armes que les hommes, elles protègent les plus vulnérables tout en étant elles-mêmes vulnérabilisées, elles sont violées, battues, exploitées sexuellement. On sait ce qu’il en fut des crimes de guerre et du viol des femmes en Yougoslavie ou dans l’Est de la République du Congo ; les tribunaux de guerre même internationaux ont du mal à les punir. Dans cette guerre, des femmes s’exilent ; elles peuvent alors être exposées à toute sorte de violence. Quand elles restent dans leur pays, elles partent des villes vers les campagnes pour protéger leurs proches. Dans pratiquement tous les pays, seuls les hommes sont mobilisés et les femmes qui veulent défendre leur patrie, prendre les armes sont minoritaires. L’armée ukrainienne comprend 15% de femmes. D’autres qui veulent participer directement à l’effort de guerre fabriquent des cocktails Molotov ou des gilets pare-balles, jettent des bombes et plus traditionnellement, soignent les blessés.
Elles ont encore plus définitivement qu’en temps de paix à assumer les tâches de care : la responsabilité de s’occuper des enfants et des personnes âgées, celle d’arriver à organiser les vies quotidiennes dans des espaces devenus chaotiques, dangereux pour elles et pour les autres. Les pleurs des femmes ukrainiennes filmées à la télévision dans les rues de Marioupol, de Kiev, d’Odessa ou de Kharkiv témoignent de cette responsabilité angoissante doublée de l’absence d’un compagnon, d’un frère, d’un fils ou d’un ami parti au front, dont on ne sait pas s’il reviendra vivant. Les images de l’Ukraine nous montrent beaucoup les pleurs des femmes. Pourquoi ne nous montrent-elles pas les pleurs des hommes, celles des Ukrainiens quittant femmes et enfants, et celles peut-être des soldats russes, tuant des frères et des sœurs au nom d’une « opération militaire » ? La guerre ne laisse pas passer toutes les images, elle les filtre et ce faisant, elle renforce les stéréotypes de genre, plaçant d’un côté la bravoure ou la sauvagerie des hommes et de l’autre les souffrances et les pleurs des femmes, toujours victimes rarement actrices de leur destin.
De la défection à la prise de parole. Un féminisme polono-ukrainien
Dans les guerres comme dans tous les schémas les plus patriarcaux, on demande aux femmes d’être loyales – c’est un obstacle à l’émancipation comme nous l’avons établi dans notre récent livre Le peuple des femmes. On leur demande d’accompagner l’effort collectif dans l’espoir d’une victoire qui mettra des hommes et seulement des hommes sur les photos officielles. Il faudrait donc oublier toute justice de genre car l’urgence serait ailleurs. On leur dit que tout ira mieux en période de paix, et qu’alors l’égalité pourra se construire. Pourtant, même en temps de guerre, les rôles des femmes sont essentiels. Ainsi, le courage des Ukrainiens n’est pas seulement celui de son président ou de ses soldats mais aussi celui de femmes résistantes, à différentes places et pas seulement à celles où l’on assigne généralement les femmes. On les voit prendre les armes, risquer leur vie.
Dans les différentes manifestations en France pour protester contre l’invasion de l’Ukraine par la Russie, des femmes prennent la parole au cœur du cortège, accusent et chantent comme dans la manifestation toulousaine du dimanche 6 mars 2022 : avec une couronne de fleurs sur la tête, place du Capitole, une femme lit un texte qui dénonce la guerre que la Russie mène contre l’Ukraine démocratique. Des instruments et des chants en ukrainien se font entendre. Les femmes portent une parole politique et s’annoncent présentes dans cette guerre. Elles ne s’effacent pas. Elles veulent compter et pas seulement auprès de leur famille ou dans les tâches traditionnellement considérées comme maternelles mais aussi dans l’espace politique, non seulement pour participer silencieusement à l’effort de guerre mais pour influencer la politique menée, œuvrer en faveur d’un monde plus juste, d’un territoire vidé de ses ennemis et souverain mais aussi d’un lendemain sans guerre.
Les femmes sont puissantes et deviennent féministes quand elles ne sont pas seulement des victimes mais décident qu’elles veulent compter pour changer le monde. C’est cela la démocratie et une Ukraine démocrate sera une Ukraine avec les femmes. Après tout, l’une des activistes féministes les plus connues en France est une Ukrainienne, Inna Shevchenko du mouvement Femen. Après tout, à l’initiative de la mairie de Wroclaw à l’ouest de la Pologne, des féministes polonaises et ukrainiennes depuis 2014 ont créé une plate-forme de dialogue entre féministes des deux pays, par le biais de discussions littéraires. Elles ont organisé ensemble des conférences qui ont récolté jusqu’à 20 000 vues sur les réseaux sociaux, succès inattendu.
Elles ont voulu réactiver la possibilité d’un matrimoine. Le point de départ fut la commémoration d’un des pères de l’indépendance polonaise, un héros national ukrainien. Cette commémoration était prévue par les hommes et pour les hommes, sans laisser de place aux femmes, en oubliant que derrière les héros se déploient toujours de petites mains qui font tenir le héros et rendent possible les actes de résistance dans leur quotidien. Ces femmes décident alors de devenir déloyales, de sortir d’un cadre qui les étouffe et de faire cette commémoration à leur façon, sans les hommes.
Alors que la politique se fait toujours par le haut, par les gouvernants, elles font fonctionner un féminisme par le bas, de la société, des gouvernées. Elles dialoguent entre elles, hors de l’espace de la nation, dans un entre-deux libérateur des paroles. Elles construisent un espace de connaissance et de reconnaissance féminisé, un contre-espace public au sens qui lui donne Nancy Fraser : une prise de parole collective de subalternisées qui veulent désormais compter, participer à la vie publique.
Ces femmes qui se constituent en puissance collective nous disent que le nationalisme serait beaucoup moins important dans de nombreux pays si les femmes s’occupaient plus des affaires publiques. Selon elles, à cause de l’Histoire qui les a subalternisées, les femmes sont plus aptes à la diplomatie tant elles ont été obligées pendant longtemps d’être loyales envers les hommes et de déjouer le contrôle exercé par eux sur elles. Elles citent Akmaral Arystanbekova, ancienne ministre des affaires étrangères du Kazakhstan : « La diplomatie est une affaire trop sérieuse pour la laisser aux hommes ». Pour elles, cette formule vaut comme une devise, la possibilité d’un chœur des femmes en faveur d’une démocratie inclusive.
Par ailleurs, cette union de féministes ukrainiennes et polonaises déploie une puissance collective face à un terme, le « féminisme », souvent considéré comme péjoratif dans les deux pays. La sororité, l’entraide et le partage de pratiques d’émancipation, de combats pour l’égalité vont alors de pair avec la remise en cause de discours sur la grande narration patriotique de la femme héroïque qui se sacrifie dans son souci des autres. Ainsi, les Ukrainiennes qui ont un accès à l’avortement peuvent accompagner les Polonaises qui luttent contre une interdiction quasi totale de l’IVG. Et les Polonaises peuvent écouter et faire surgir les voix des régions traditionnelles de l’ouest et du centre de l’Ukraine où des mariages précoces ont encore lieu.
Mais surtout, à partir de 2020, face au Donbass ukrainien occupé par des séparatistes soutenus par la Russie, ce contre-public féministe décide d’explorer avec l’outil de la littérature le rapport des femmes à la guerre. Avec tous les matériaux de récits qu’elles ouvrent et transmettent dans leurs conférences, elles montrent combien les femmes paient un prix énorme avec la guerre, en restant seules, en perdant leurs maris, leurs fils, leurs proches. Et pourtant, avec toutes les souffrances et malheurs qui sont leur lot, elles sont absentes du discours public. On pourrait bien sûr aller plus loin et rappeler combien les femmes sont tuées, violées, exploitées et oubliées quand elles prennent les armes comme les femmes kurdes luttant contre Daesh et présentes au sein des organisations politiques du PKK. Pourquoi sont-elles alors effacées alors même qu’elles sortent de leur statut de victimes pour devenir des actrices de l’Histoire ? Parce que le cadre de l’Histoire mainstream reconduit les stéréotypes qui ont la vie dure en temps de guerre.
La Russie de Poutine a posé le cadre d’une guerre on ne peut plus stéréotypée dans son récit viriliste. Comment les femmes feront-elles pour ne pas être marginalisées en un siècle de plus en plus féministe, alors même que la vague planétaire #MeToo a mis en avant un peuple des femmes, des prises de parole collectives contre le patriarcat qui dessinent des mouvements de femmes de plus en plus transnationaux, contagieux et qui se déploient tout autant au Sud qu’au Nord ?
Dès le 1er mars 2022, les féministes russes ont lancé un appel contre la guerre menée par Poutine. Bravant ce qu’elles nomment une « répression d’Etat », elles appellent les féministes du monde entier à s’unir contre la guerre et l’occupation en Ukraine. Dans la Russie contemporaine, les féministes constituent un des mouvements sociaux les plus offensifs et les plus à même de s’opposer à Poutine à l’image des Pussy Riot, ce groupe de punk rock féministe, originaire de Moscou et dont les performances artistiques non autorisées ont non seulement troublé l’ordre patriarcal russe, valant à ces femmes artistes la prison, mais ont aussi participé d’un féminisme transnational et activiste en faveur des droits des femmes.
La guerre qui se joue à l’Est de l’Europe et où l’Ukraine est assiégée par des bombes ne se fera pas sans les femmes, sans une place conférée non seulement dans les sphères traditionnelles de la féminité mais aussi dans celles de la décision politique et militaire, et sans l’union des féministes par-delà les nations, en faveur d’une paix durable et démocratique qui n’est pas seulement un idéal mais doit devenir une réalité.
Sortir du patriarcat malgré la guerre
La guerre initiée par Poutine est patriarcale au sens où elle reconduit dans l’invasion de l’Ukraine un masculin fort (la Russie) et un féminin faible (l’Ukraine), la faiblesse supposée de cette dernière se jouant aussi dans la mollesse des démocraties face à la détermination des régimes autoritaires. Le cadre hiérarchique qui se joue alors permet la prise, la conquête et le contrôle. La guerre réelle sort de ce cadre car elle concerne les femmes, les hommes, les personnes trans, etc. et ne peut en rester à l’hétéronormalité imposée, qui poserait déjà la défaite de l’Ukraine.
Le rôle des démocraties est bien sûr de s’engager auprès de l’Ukraine. Mais, et ce n’est pas anodin, dans le traitement médiatique, le récit fait de cette guerre et dans la perspective d’un règlement de la guerre et d’un retour de la paix, personne ne doit oublier les femmes ou les cantonner à des stéréotypes qui ne disent pas l’entière réalité.
D’autant que les femmes, de par leur histoire, ont plus de distance avec la guerre, et pensent plus à la paix. Peut-être d’abord parce que les assignations elles-mêmes font que les femmes se sentent plus isolées et en appellent davantage à la paix pour sortir de l’horreur de la guerre. Selon un rapport de l’ONU rendu le 25 octobre 2018, les femmes ne sont pas seulement absentes des récits sur la guerre mais elles sont absentes lors des processus de paix : elles constituent seulement 2% des médiateurs, 5% des témoins et signataires et 8% des négociateurs dans les processus de paix majeurs. Et seuls 3 des 11 accords de paix signés en 2017 contenaient des dispositions relatives au genre. Pourtant, selon ce même rapport, la participation des femmes dans ces processus augmente de près de 35% la probabilité d’un accord durable. Selon l’ONU, au Kosovo, les dialogues communautaires menés par des femmes au titre de l’initiative des femmes de Mitrovica pour le renforcement de la confiance ont joué un grand rôle dans la pérennisation de la paix[3]. Les femmes ne doivent pas être seulement considérées comme des victimes mais comme des parties qui prennent part.
Ce rôle des femmes, cette présence d’une justice de genre dans la guerre et son traitement politico-médiatique sont plus que jamais importants dans la guerre que l’Ukraine mène contre l’envahisseur russe puisque Poutine lui-même a posé sur cette conquête qu’il appelle de ses vœux un cadre patriarcal. Ils sont d’autant plus importants que l’Ukraine en appelle à la démocratie, que des femmes ont occupé des positions politiques éminentes.
En conclusion, nous souhaitons relayer à notre tour l’appel des sœurs féministes de Russie dont les différents mouvements sont momentanément réunis sous le slogan, « Résistance féministe anti-guerre », et cela alors même que beaucoup sont arrêtées à Moscou ou ailleurs :
« Aujourd’hui, les féministes sont l’une des rares forces politiques actives en Russie. Pendant longtemps, les autorités russes ne nous ont pas perçues comme un mouvement politique dangereux, et nous avons donc été temporairement moins touchées par la répression d’État que d’autres groupes politiques. Actuellement, plus de 45 organisations féministes différentes opèrent dans tout le pays, de Kaliningrad à Vladivostok, de Rostov-sur-le-Don à Oulan-Oudé et Mourmansk. Nous appelons les féministes et les groupes féministes de Russie à rejoindre la Résistance féministe anti-guerre et à unir leurs forces pour s’opposer activement à la guerre et au gouvernement qui l’a déclenchée. Nous appelons également les féministes du monde entier à se joindre à notre résistance. Nous sommes nombreuses, et ensemble nous pouvons faire beaucoup : au cours des dix dernières années, le mouvement féministe a acquis un énorme pouvoir médiatique et culturel. Il est temps de le transformer en pouvoir politique. Nous sommes l’opposition à la guerre, au patriarcat, à l’autoritarisme et au militarisme. Nous sommes l’avenir qui prévaudra. »
NDLR : Fabienne Brugère et Guillaume le Blanc ont publié Le Peuple des femmes. Un tour du monde féministe chez Flammarion en février 2022.