Stayin’ Alive, la liberté d’un art en vie

Pour William Burke[1]
On a le sentiment qu’être vivant·e dure plus longtemps qu’être en vie. Comme si le son du mot vi-vant une fois prononcé accordait du temps supplémentaire. Quand on y réfléchit bien, le plus souvent, on n’a pas juste envie d’être vivant·e mais de le rester. Une fois qu’on choisit de se pencher sur ce qui est ou qui reste vivant au sein des arts, on s’engage dans une observation accrue des contextes culturels, sociaux, politiques au sein desquels les artistes ont œuvré pour réfléchir à la vie. Si on décide d’orienter son investigation vers une actualité artistique doublée de la commémoration d’un événement majeur de l’histoire contemporaine, on saisit à quel point la conscience d’être vivant·e affecte notre perception de ce qui l’a été.
En 2019, se sont succédé des manifestations (expositions, publications, émissions, actions) en hommage, cinquante après, aux émeutes de Stonewall qui ont explosé le 28 juin 1969 dans la chaleur d’un été new-yorkais. Moment de bascule historique, la révolte de la communauté gay, lesbienne et trans est devenue effective en une nuit. La descente de police au Stonewall Inn, un bar situé dans le West Village à la station de métro Christopher Street, a, ce soir-là, produit un point de non-retour pour une population sur le qui-vive, épuisée par les répressions et violences sexuelles, raciales et sociales.
Simple routine hebdomadaire, avec la complicité de la mafia et moyennant pots de vin et cadeaux habituels, les policiers arrivent au Stonewall Inn comptant réitérer les contrôles humiliants et procéder aux arrestations sommaires. Comme à chaque fois, trois groupes sont constitués de force : les gays, lesbiennes et trans séparé·e·s sont fouillé·e·s. Les lesbiennes masculines, Drag Kings, ont intérêt à porter au moins trois pièces de vêtement féminin pour éviter le poste. Comme le rappelle en 2000, Sylvia Rivera dans un témoignage poignant, il y a eu ce soir-là, l’impératif d’une insurrection ; il fallait faire cesser