Travailler son cul / Faire de la littérature : Dustan en artisan
Lire Dustan, c’est prendre une sorte de double risque, celui, très simple, de se prendre frontalement un flot de descriptions sexuelles crues, celles de pratiques gay sado-masochistes minoritaires et peu représentées en littérature.

C’est aussi aller à l’encontre d’une certaine vision de la « littérature homosexuelle », de la constitution même d’une telle catégorie, tant est patente la démarche profondément individuelle de Dustan et son refus évident de toute communauté autre que directement utilitaire, alors même que l’urgence du sida exigeait pour beaucoup la fondation d’une écologie sexuelle responsable.
Pour autant, plus de quinze ans après sa mort, le ressentiment s’érodant peut-être à l’égard d’une personnalité publique navrante, selon beaucoup, dans ses provocations, il est permis de fouiller dans la chair du texte ce qui se joue de profondément dynamique dans la pensée Dustan. L’édition du deuxième tome de ses œuvres complètes chez P.O.L, sous la direction éclairée de l’universitaire et écrivain Thomas Clerc, permet d’établir certains rapports passionnants et notamment celui, fondamental, entre savoir-faire sexuel et technique littéraire.
« Ce qui se joue dans ce deuxième volume, selon Thomas Clerc qui signe préfaces et présentations, c’est le passage du sexe au genre, du “je” au “nous” et de la subjectivité pure à l’impureté de la politique ».
Dans ces trois alternatives, qui correspondraient selon Clerc à une évolution valorisable, et surtout qui constitueraient la possibilité d’une réhabilitation, se joue une superposition questionnable : quel serait donc le rapport entre, par exemple, le genre et le « nous », ou le genre et l’impureté de la politique ? Pourquoi, et surtout comment, faire rentrer Dustan dans le champ de la politique ?
Élargir sa pratique, élargir son pénis, travailler son cul comme on travaille son texte.
La première question est à poser dans un contexte historique, celui du mépris, voire de la hargne d’un milieu envers un perso