Art contemporain

Où est mon encorporation ? – sur le « Panorama 25 » du Fresnoy

Critique

Un quart de siècle après sa création, le Studio national des arts de Tourcoing continue de cultiver la vidéo en pointe (et la création sonore, et le cinéma, et l’installation). L’exposition annuelle de ses étudiant·es déroule les problématiques de l’époque, mais en nous faisant former des fantômes, en faisant bégayer les identités numériques : on songe du coup à la difficulté d’avoir un « regard situé ».

Une fois de plus –, je m’avance, une fois de plus, le long de ces couloirs, à travers ces salons, ces galeries, dans cette construction – d’un autre siècle… Euh non, pardon, ça c’est le début de L’Année dernière à Marienbad de Robbe-Grillet. Reprenons : donc, une fois de plus, on s’avance au fond du Fresnoy, complexe culturel fondé en 1997 à Tourcoing et qui abrite une prestigieuse école, le Studio national des arts.

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On dit « au fond » car les espaces d’exposition publics, prolongés d’une salle de cinéma, ressemblent à une immense fosse ou une arène, le contraire d’un « white cube » : plutôt un « dark space ». Un antre sous hangar où chaque année, de septembre à décembre, défilent des expérimentations de haut vol (technologique) concoctées par de jeunes artistes qu’a choisi·es à la main un jury rassemblé autour de l’écrivain et cinéaste Alain Fleischer, directeur du Fresnoy depuis sa création.

C’est l’exposition dite « Panorama ». L’École en est à sa 25e. Le commissariat est confié cette année à Chris Dercon, directeur de la fondation Cartier pour l’art contemporain. Pas de peinture au Fresnoy ni de céramique : c’est films et installations.

La première année du cursus est dévolue « à la production d’œuvres s’appuyant sur les langages, les techniques et les supports du cinéma, de la photographie, de la vidéo et de la création sonore et musicale, dans une logique d’expérimentation et de croisement des pratiques », performance comprise. La seconde année à la « création numérique » et plus largement à « toutes les innovations technologiques dont l’art peut faire son profit. » Ainsi de l’IA, utilisée par exemple à petite dose par Ethel Lilienfeld dans EMI, vidéo mettant en scène une influenceuse (presque) virtuelle : génération d’images et création d’un « programme afin d’automatiser le traitement vidéo » sont au menu, ainsi que quelques NFTs (du moins en théorie car, après avoir essayé d’acheter un foie d’EMI sur son site, on est reparti sans débourser un radi


[1] -Arnaud Pelletier, « Encorporation et point de vue selon Leibniz. Apostille à la lecture de Deleuze », dans Philosopher en points de vue : Histoire des perspectivismes philosophiques, Presses de l’Université Saint-Louis, 2020.

[1] « Savoirs situés : question de la science dans le féminisme et privilège de la perspective partielle », dans Le manifeste cyborg et autres essais, Exils Éditeur, 2007. Traduit par Denis Petit en collaboration avec Nathalie Magnan.

Éric Loret

Critique, Journaliste

Notes

[1] -Arnaud Pelletier, « Encorporation et point de vue selon Leibniz. Apostille à la lecture de Deleuze », dans Philosopher en points de vue : Histoire des perspectivismes philosophiques, Presses de l’Université Saint-Louis, 2020.

[1] « Savoirs situés : question de la science dans le féminisme et privilège de la perspective partielle », dans Le manifeste cyborg et autres essais, Exils Éditeur, 2007. Traduit par Denis Petit en collaboration avec Nathalie Magnan.