Pas de pouvoir sans consentement
QOT. Durant des siècles – en gros depuis le milieu du Moyen Âge –, ces trois lettres ont été une référence centrale de la pensée politique, des théories du pouvoir juste et des conceptions modernes de la représentation. Acronyme de la maxime latine Quod omnes tangit ab omnibus tractari debet venue du droit civil et signifiant que ce qui concerne tout le monde doit être débattu et approuvé par tout le monde, elles ont progressivement signifié l’obligation pour tout pouvoir d’obtenir le consentement de ceux sur qui il prétend exercer une autorité légitime.

Ce principe s’est ainsi imposé dans l’Église médiévale – dans les grands conciles qui prétendirent brider le pouvoir pontifical ou dans certains ordres religieux, par exemple – mais aussi au sein de pouvoirs séculiers qui cherchèrent, notamment pour les questions fiscales, à obtenir le consentement des sujets. Cette nécessité du consentement fut ainsi le fondement des assemblées représentatives modernes – parlements, États provinciaux ou généraux, diètes diverses – qui surent l’invoquer contre les exigences excessives des souverains et en faire un outil efficace de négociation.
C’est ce principe majeur de l’histoire politique occidentale – et de l’histoire de l’invention de l’impôt direct permanent – que la révolte des « gilets jaunes » est venu rappeler de manière spectaculaire, rendant inopérantes ou sans objet les catégories étroites dans lesquelles on a cherché initialement à l’enfermer. Jacquerie, révolte antifiscale d’Ancien Régime, révolte de modernes canuts restés pauvres malgré leur travail et condamnés à observer de loin la prospérité insolente de ceux-là mêmes qui les condamnent au dénuement, dégagisme et rejet des aristocraties scolaires et électives que la République façonne sans remords, exaltation d’un peuple souverain mais incertain : leur révolte n’est rien de cela et pourtant un peu de tout cela à la fois.
L’effet de sidération qu’elle a exercé sur le pouvoir tient sans doute à ce mélange instable