Société

Toujours contre la peur – réponse à Jean-Pierre Dupuy

Philosophe

Dans une lettre ouverte publiée la semaine dernière dans nos colonnes, le philosophe Jean-Pierre Dupuy reprochait à son ami André Comte-Sponville d’avoir publiquement minimisé la gravité de l’épidémie de Covid-19, et ainsi d’avoir relativisé l’importance du confinement. Il lui répond ici, et précise les fondements éthiques de ses prises de position. De toutes les « passions tristes » qui nous menacent, la peur n’est pas la moindre, il n’est donc pas inutile de s’employer à la relativiser encore et toujours.

Cher Jean-Pierre,

Merci pour ton mail et pour la « lettre ouverte » qui l’accompagne. Merci, surtout, pour ton amitié, maintenue malgré nos divergences : celle-là me touche davantage que celles-ci ne me heurtent.

Contrairement à ce que tu écris dans ton mail, je n’ai pas voulu soutenir « une cause » dans ce débat, encore moins mener une « campagne politique » ! Sur ce sujet de la pandémie et du confinement, j’ai simplement accordé quelques entretiens, dans la presse écrite ou à la radio, et participé à deux émissions de télévision (« C’est à vous », puis « La Grande Librairie », les deux sur la 5). Or il se trouve que depuis la première de ces émissions, j’ai refusé très exactement dix-sept invitations (je les ai comptées !), sur différentes chaînes (certaines m’ont invité plusieurs fois), justement parce que je n’avais nulle envie de me répéter davantage, et encore moins de mener quelque campagne que ce soit !

J’ai refusé, pour la même raison, la plupart des interviews qui m’ont été proposées, à la radio ou dans la presse écrite, depuis les trois que tu évoques (que je n’avais bien sûr pas sollicitées), dans Le Journal du dimanche, Le Point et Philosophie Magazine. Enfin, le plus long entretien que j’ai fait sur le sujet, et que je t’ai envoyé, était destiné à un hebdomadaire de l’Est de la France, La Semaine, qui l’a publié dans son numéro du 23 avril. Tu m’accorderas que, comme organe de presse, j’aurais pu trouver plus porteur ! Bref, je te rassure : aucune volonté militante de mon côté ; juste l’aveu d’un étonnement et d’une inquiétude.

Inquiétude, pour commencer, devant la place croissante et souvent exorbitante que la médecine tend à occuper dans nos vies et nos sociétés : ce que j’ai appelé « pan-médicalisme » et que tu appelles, depuis fort longtemps, me dis-tu, « médicalisation de la vie ». Comme c’est l’un de nos rares points d’accord, dans ce débat, il est inutile que je m’y attarde.

Tu notes « avec un amusement modéré » l’évolution des nombres de décès


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Covid-19