Politique de la « dépolitisation »
La politique a-t-elle disparu avec les votants ? C’est la question que se posent aujourd’hui légitimement nombre de militant-e-s de gauche, sincèrement désarçonnés par un nouveau scrutin marqué du sceau de l’abstention massive et par ses conséquences relativement désastreuses.
Au-delà des larmes de crocodile maintenant vite essuyées et des phrases convenues, répétées à vide (« l’abstention est le premier parti de France », « le silence est assourdissant », « cela doit tous nous remettre en question » etc.), il s’agit d’observer à quel point une partie majoritaire du champ politique s’accommode parfaitement de cette nouvelle donnée structurelle de la compétition électorale. Cette trivialité s’analyse.
Les mines réjouies d’anciens ministres de l’ère Sarkozy triomphants, tout comme l’empressement de tel ou tel à se proclamer central pour tout ce qui passera à gauche, nous rappellent à quel point l’état de crise (ici démocratique) peut être « routinier », pour reprendre une analyse encore pleinement d’actualité du politiste Michel Dobry.
État spécifique d’un système de représentation et de son appropriation par le monde social, cette « grève des urnes » rencontre de nombreuses explications dont certaines interpellent singulièrement la gauche : héritière d’une vision positive de l’engagement, elle s’est construite sur cet accord minimal autour de l’idée que « la politique sert à quelque chose », sur un temps long rythmé par la promesse d’une société meilleure. À l’aune de ce futur-là, les « répétitions générales » composaient le passé, et le présent était en quelque sorte relativisé. Mais il semble bien que l’horizon du temps s’est raccourci et que dans ce resserrement, une crise de légitimité se déploie radicalement, emportant parfois tout sur son passage.
Dans les villes et les quartiers marqués tout au long du XXe siècle par le lien entre la gauche et classes populaires, une nouvelle étape semble franchie. En Île-de-France, pour celles et ceux qui étudient le phénomè