Pragmatique de la transition
Je sortais de la lecture de l’excellent Pour l’intersectionnalité d’Éléonore Lépinard et Sarah Mazouz [1] quand je suis tombé sur l’article « Nouveaux troubles dans le genre : identité ou identification ? » du psychanalyste Pierre Marie, publié ici même.
Quoique m’ayant enthousiasmé, Pour l’intersectionnalité avait conjointement réveillé en moi le souvenir de certains agacements récents devant des écrits et paroles d’étudiant.e.s ou d’enseignant.e.s qui, à mon sens, maniaient les études sur le genre ou la race non pas à coups de marteau (ça j’aime plutôt bien), mais en tapant à côté de l’enclume. J’avais beau adhérer à l’esprit de ces « studies », je restais parfois heurté par la tendance de certain.e.s chercheur.e.s à verser dans l’essentialisme ou à aligner des éléments de langage sans réfléchir au contexte – voire à éliminer volontairement celui-ci dans un but d’intimidation intellectuelle.

En me rappelant ces agacements, je voyais bien que j’avais tort de me focaliser sur celleux qui criaient le plus fort, au détriment de celleux qui pensaient le mieux. Il me semblait qu’il y avait quelque chose à approfondir autour de la question des « savoirs » ou « points de vue » dits « situés », c’est-à-dire qu’il me semblait que, dans tout ce qui m’avait agacé, mes interlocuteur.ice.s en lutte avaient banalement pris leur point de vue pour une connaissance : un travers qui n’épargne personne, mais que l’intersectionnalité apprend justement à défaire. Et qu’on gagnerait donc à plonger plus profondément bébé dans l’eau de son bain au lieu de jeter l’un et l’autre.
Cette accusation d’essentialisation, je la retrouvais sous la plume de Pierre Marie à l’encontre de la transition de genre : « C’est […] une manie récente qui nous obligerait à revêtir une identité sexuelle, à nous déclarer féminin ou masculin, hétérosexuel ou homosexuel, voire transsexuel. » Je me reconnaissais un peu dans ce refus de « l’identité », mais comme dans un miroir grimaçant : car quoique l&rs