Architecture

Décoloniser l’architecture ici et maintenant

Architecte et enseignant chercheur

Inviter à prendre au sérieux les tentatives de décolonisation de l’architecture, c’est mettre en lumière les façons dont l’architecture n’est pas que « coloniale » dans des situations d’occupation de territoires lointains, à des époques révolues ou dans des géographies exotiques. On pourrait, par exemple, commencer par se pencher sur les bâtiments construits pour Paris 2024…

Dans quelques mois auront lieu les Jeux Olympiques en Ile-de-France. Pour que le Village des athlètes et le Village des médias sortent de terre, il aura fallu le travail d’un certain nombre d’agences d’architecture, bureaux d’études, économistes de la construction et autres ingénieurs. Il aura été question de négociations et de lobbying politiques, de dossiers séduisants et de juteux investissements de la part des majors de la promotion immobilière et du BTP. Mais aussi et surtout, il aura fallu des ouvriers. Or, à ce sujet, les propos sont unanimes : « il n’y a pas de Français sur les chantiers, ils sont tous dans les bureaux ».

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Les études montrent que la construction est le deuxième secteur recensant le plus de travailleur·ses immigré·es et on trouve trois fois plus d’immigrés que de non-immigrés parmi les « ouvriers du gros œuvre du bâtiment »[1]. Ils représentent environ un quart des ouvriers du gros œuvre et un sixième des ouvriers du second œuvre, pour seulement un dixième des cadres du BTP. Ce qu’il fallait démontrer : « Un emploi est plus souvent occupé par un immigré lorsque le métier est exposé à des conditions de travail pénibles. »[2]Les blanc·hes laissent aux autres corps, aux corps des autres, les métiers et les travaux les plus dangereux et les plus usants, les plus précaires, les moins valorisés, et encore ceux où l’évolution sociale est la moins facile.

Simultanément, on ne voit pas l’ombre (ou presque) d’une diversité ethnique dans les grands prix d’architecture – Équerre d’argent, Albums des jeunes architectes et paysagistes, Grand prix de l’urbanisme ou Palmarès des jeunes urbanistes –, ni côté lauréat·es ni côté jury. Le tableau dessiné par ces seuls faits est déjà limpide : un travail de « décolonisation »[3] de l’architecture est à mener. C’est à ce chantier qu’entend s’atteler l’ouvrage Décoloniser l’architecture paru ce mois-ci aux éditions Le Passager Clandestin.

Pour la militante décoloniale Françoise Vergès, « peu de champs d’études, de recherche et de disciplines échappent aujourd’hui à la question de leur décolonisation. Ce qui conduit, inévitablement, à préciser en quoi tel champ est colonial, ce que sa décolonisation signifie, à quelles théories elle se rattache, quelle en est la méthode, quels en sont les objectifs et comment y parvenir. »[4]

Ambitieux programme de travail que celui, décolonial, qui nous attend collectivement ! Mais voilà : le concept « d’architecture » renvoie au moins à celui d’édifice (l’architecture bâtie), à une réalité sociale (les communautés et métiers de l’architecture) et encore à une discipline (et ses deux mille ans au moins de théories architecturales). Par où commencer alors ? Et que pourrait bien signifier, concrètement, l’idée de « décoloniser l’architecture » ?

Nulle volonté de décoloniser l’architecture ne peut exister sans une prise en compte radicale des réalités sociologiques de la construction – comme point de départ et comme horizon, comme moyen et comme fin. Et ces réalités nous portent nécessairement à une première conclusion : pas de décolonisation sans antiracisme. Cela étant clarifié, il devient possible de s’engager dans des propos théoriques et des réflexions critiques sur le profond occidentalo-centrisme des références et des valeurs, des univers et des imaginaires, des concepts et des systèmes de pensées de l’architecture.

La théorie de l’architecture est presque toujours issue de personnalités occidentales dont les systèmes de valeurs sont eurocentrés.

Pour Isabelle Regnier, journaliste spécialisée en architecture au journal Le Monde, c’est un fait : l’architecture est un milieu aussi « radicalement blanc » que « structurellement dominé par la pensée occidentale ». C’est qu’en effet, du côté des pratiques architectures, quid des grandes « références » incontournables, des architectes les plus cités et de leurs réalisations canoniques : ne sont-elles pas presque toutes issues des Nords ? Quant à celles qui le seraient un peu moins (Zaha Hadid, Oscar Niemeyer, Amateur Studio…), on pourrait facilement montrer qu’elles reconduisent bons nombres des codes les plus occidentalocentrés de la discipline (au moins en ce que ce sont des architectures amplement bétonnées et énergivores, industrielles voire hypertechnologiques suivant les cas, conçues par ces archistars comme des monuments modernes spectaculaires au service de leur propre gloire).

Même constat pour la théorie de l’architecture, qui est – presque toujours – issue de personnalités occidentales dont les systèmes de valeurs et les prises de positions sont copieusement eurocentrés. Et il en va de même encore pour les références intellectuelles extérieures invoquées par les milieux de l’architecture : elles restent, elles aussi, en 2024 encore, largement détachées de ces problématiques décoloniales. Mais enfin pourquoi en appeler encore et toujours à Heidegger, Deleuze, Derrida, Merleau-Ponty et Bachelard en guise d’assise intellectuelle au projet d’architecture, et pas aussi (ou plutôt) à Édouard Glissant, Fatima Ouassak, Trinh T. Minh-ha, Achille Mbembe et Vandana Shiva ?

Une raison à tout cela tient probablement à l’attachement des milieux de l’architecture aux structures de pensées universalistes[5]. Car si quelques familles architecturales ont bien commencé à envisager l’intérêt de construire de façon un peu plus située, contextuelle, en relation avec des filières et des géographies singulières, ce n’est que bien plus rarement qu’on trouve des déclarations d’architectes réellement désireuses de déconstruire le système de valeur universaliste. D’où, probablement, le succès des propositions telles que celle du « régionalisme critique »[6], qui permet aux architectes de penser un peu plus localement sans pour autant abandonner la modernité occidentale qui structure fondamentalement leur corps disciplinaire actuel. À l’opposé de cela, un concept ancien comme celui de Plurivers, récemment reconceptualisé et problématisé par des auteurs comme l’anthropologue américano-colombien Arturo Escobar, défend la possibilité d’un monde où une multitude de mondes pourraient cohabiter.

Politiquement parlant, penser en termes de de Plurivers, c’est insister sur l’importance de penser par-delà l’idéologie du « développement » considéré comme un « colonialisme déguisé »[7]. C’est vouloir en finir avec cette « construction homogénéisante », qui n’est autre chose que la version positiviste de l’idéologie du système colonial-capitaliste et ses systèmes concrets d’extraction et d’exploitation des peuples, milieux et matières. Nous sommes ici à l’opposé des injonctions contemporaines au « développement durable » – à savoir, littéralement, la promesse de faire durer le plus longtemps possible, la pensée développementiste, dans une optique conservatrice de « maintien de l’ordre social actuel », pour que « nos enfants aient la même vie que nous »[8] (c’est-à-dire bénéficient de la même capacité à exploiter les Suds pour leur confort).

C’est en tout cela que le programme décolonial pour l’architecture doit se lier aux propositions philosophiques et politiques du Plurivers s’il veut avoir une chance de désoccidentaliser ses codes et références culturelles. Sans cela, l’argument universaliste reviendra systématiquement en guise de légitimation de l’occidental-pour-toustes.

Une autre raison tient probablement à l’impérialisme qui fonde la discipline architecturale depuis plusieurs milliers d’années déjà. Voici plus de deux mille ans déjà qu’est paru le tout premier « Traité » architectural fondateur, rédigé par l’architecte militaire Vitruve à l’attention de l’Empereur Auguste dans une optique impérialiste. Le soucis avec ce texte ne vient pas uniquement du propos s’ouvrant sur une glorification éhontée de la violence avec laquelle l’Empire romain a « terrassé » des ennemis ayant fini par reconnaitre « la supériorité de sa valeur ». Il vient aussi et surtout, pour l’architecture, des manières dont Vitruve propose explicitement de placer la discipline au service de cet Empire romain violent (et, oserait-on dire, « colonial » ?). Se disant « reconnaissant » à l’Empire pour la rente à vie touchée pour ses bons et loyaux services en tant que chargé de la construction de machines de guerre, l’architecte Vitruve l’écrit comme un ouvrage utile à l’Empereur pour poursuivre son travail de construction d’« illustres monuments » bâtis « pour laisser la postérité » la marque de sa « grandeur ». Une théorie générale on ne peut plus explicitement impérialiste, à laquelle hélas se réfère encore aujourd’hui bon nombre d’architectes, d’enseignant-es en architecture… jusqu’au Ministère de la Culture lui-même[9].

De nombreuses critiques sont parues de longue date, sur les prétentions, discours grandiloquents, conflits d’intérêts et fantasmes démiurgiques de l’architect(ur)e. Mais c’est plus structurellement encore que les pensées décoloniales poussent aussi à interroger les rapports de l’architecture avec « l’ordre ». Qu’est-ce qu’un architecte dessine réellement lorsqu’il compose un plan bien « ordonné » ? À bien des égards, si l’édifice et la discipline architecturale cristallisent des enjeux d’ordre, c’est d’une manière qui dépasse très largement la simple question formelle et artistique.

L’architecture est discours et configuration politico-sociale, elle est moteur et condition de possibilité de l’espace social, elle accompagne les pouvoirs et contre-pouvoirs en place – bref, l’ordre qu’elle installe est tout sauf innocent. George Bataille nous en avertissait dès 1929 : « l’ordre humain [est] dès l’origine solidaire de l’ordre architectural, qui n’en est que le développement »[10]. Mais voilà, nombreux sont les architectes qui feignent de ne pas voir ces liens, se repliant derrière l’idée prétendument formelle ou structurelle que « la diversité sans ordre, c’est le chaos assuré. »[11]. Le raisonnement implicite est le suivant : sans architectes, pas d’architecture ; sans architecture, pas d’ordre ; et sans ordre, le chaos. Ce qu’il fallait démontrer : sans architectes, c’est le chaos assuré. La collusion sémantique est parfaite pour l’esprit corporatiste, la défense du système d’expertise dépossédant et les différents monopoles qui y sont liés. Pour ne rien dire des pensées fascistes potentiellement très satisfaites par ces capacités architecturales de « mise en ordre »…

Ainsi de « l’architecture » comme potentiel outil historique d’éradication des minorités culturelles et de « mise en ordre » du monde : il n’y a sans doute pas à s’étonner en suivant qu’un certain « universalisme » habite encore profondément l’esprit de bon nombre de ses protagonistes. Ces constats critiques sont aussi ceux du spécialiste de la question Leopold Lambert, éditeur de la revue décoloniale d’architecture The Funambulist, et auteur d’un article aussi intitulé « Décoloniser l’architecture ». Cet architecte de formation y insiste bien sur « la violence » de l’architecture considérée comme « arme politique ». Pour lui, toutefois, la décolonisation de l’architecture est illusoire, pour autant que « décoloniser l’architecture, c’est en quelque sorte construire une architecture contre elle-même »[12].

Le chantier de décolonialisation de l’architecture devra être collectif et outrepasser les pré-carrés des communautés architecturales.

Insistons alors : que la décolonisation de l’architecture soit impossible ne la rend, paradoxalement, pas moins nécessaire et urgente. De l’exacte même façon que « l’impossible décolonisation du musée » universel européen, qui existe « par et dans ce contexte » colonial, est chez Françoise Vergès un objectif éthique et politique urgent et nécessaire, qui nous invite tant à envisager la possibilité d’un « post-musée » (et pourquoi pas une « post-architecture », après tout ?), que, plus radicalement, « les conditions de la nécessaire abolition de ce monde »[13]. Comment alors engager la société contre ces héritages problématiques de l’architecture ? Parce qu’évidemment la fabrique des établissements humains est partagée par de larges pans de la société civile, le chantier de décolonialisation de l’architecture, ses processus et ses résultats, devra nécessairement être collectif et outrepasser les pré-carrés des communautés architecturales. Aux marteaux et aux tournevis, citoyen·nes !

De nombreux chantiers sont déjà à l’œuvre en ce sens. Bon nombre de pédagogies décoloniales et antiracistes ont été montées à l’international dans les milieux de l’architecture[14]. Des agences et groupes de travail telles que l’agence New South de Meriem Chabani, Forensic Architecture ou Decolonizing Architecture Art & Research (DAAR) revendiquent cette éthique comme cadre et comme horizon pour leurs pratiques.

Des thèses de doctorat en architecture explorent l’angle décolonial comme épistémologie, enjeu et horizon éthique pour la discipline[15]. Ici, la curatrice de la Biennale d’architecture de Venise 2023 Lesley Lokko rappellait utilement que décolonisation et décarbonisation de l’architecture vont de pair, et le Brésil remporte le Lion d’or de la Biennale avec son pavillon décolonial sur les fondements impérialistes de l’architecture de Brasilia. Là, dans une émission de radio nationale, on se demande avec Sénamé Koffi Agbodjinou comment décoloniser les architectures du continent africain. Ailleurs encore, on organise une rencontre sur les relations entre « architecture, décolonisation et pratiques écologiques dans la France d’après-guerre ».

De ce terreau existant peuvent naître de nouvelles dynamiques, pour faire mûrir les esprits et changer profondément à la fois les habitudes et les méthodes de travail. Un chantier qu’il faudra nécessairement ouvrir dans des logiques d’alliances dissymétriques, (auto-)critiques et solidaires à la fois, entre racisé·es et blanc·hes.

Inviter à prendre au sérieux les tentatives de décolonisation de l’architecture, c’est donc mettre en lumière les façons dont l’architecture n’est pas que « coloniale » dans des situations d’occupation de territoires lointains, à des époques révolues ou dans des géographies exotiques. Décoloniser l’architecture est un enjeu local contemporain dès lors que l’on s’accorde avec le fait qu’il n’y a « pas d’innocence blanche » puisque « le confort des vies en Europe s’est construit sur l’extraction et l’exploitation du Sud global, ce dont même les classes populaires ont fini par profiter »[16]. La décolonisation doit prendre place ici et maintenant, c’est un chantier qui nous concerne tou·tes.

À la lecture de l’excellent ouvrage Pour une écologie pirate de Fatima Ouassak, on pourrait se prendre à rêver un peu. Et si l’architecture pouvait être métamorphosée en un outil de résistance populaire au « système colonial-capitaliste », vers une société plus multiculturelle ? Et si elle pouvait servir de dispositif de ré-ancrage pour tout le monde, et plus encore pour toutes les populations maintenues dans l’errance et la hogra[17], systématiquement insultées et désancrées, sans terre et donc sans pouvoir ? Et si les architectes pouvaient constituer une communauté antispéciste et antiraciste qui soit vraiment au service du vivre-ensemble populaire, plutôt que de poursuivre leurs multiples collaborations problématiques avec les projets de numérisation et de métropolisation du monde, avec les politiques vivement critiquées de l’ANRU (Agence nationale de rénovation urbaine), et avec la fabrique néolibérale de la ville par les majors du profit ?

Parce qu’elle convoque et assemble des quantités phénoménales de matières, d’énergies et de technologies, mais aussi en ce qu’elle est configuratrice de territoires et de modes de vie, l’architecture est au cœur de ces problématiques d’extractions et d’exploitations multiples. Voilà pourquoi il est devenu insupportable à beaucoup, architectes compris, d’entendre encore l’architecture évoquée comme une discipline « autonome », considérée « à part », hors du monde et ses problématiques, et donc hors des difficultés et des responsabilités qui s’y jouent.

Quoiqu’en disent quelques-uns de leurs hérauts les plus adulés[18], les architectes ne peuvent plus éviter leur responsabilité, et leur potentiel d’action face aux problématiques socio-écologiques contemporaines. Ainsi y’a-t-il urgence à constituer de nouveaux groupes de travail à la fois intra- et extra-architecturaux, pour recoudre les liens entre cette discipline, ses résultats concrets, et les désirs partagés d’écologie sociale.

Parce qu’il n’y a d’écologie que décoloniale[19], et parce que pour bien des raisons, « décarbonation et décolonisation sont les deux faces d’une même pièce »[20], l’architecture écologique sera, nécessairement, décoloniale.

NDLR : Mathias Rollot a récemment publié Décoloniser l’architecture aux éditions Le Passager clandestin


[1] Aurore Desjonquères et al., « Les métiers des immigrés », Dares, septembre 2021.

[2] Aurore Desjonquères, Bertrand Lhommeau, Moustapha Niang et Mahrez Okba, Quels sont les métiers des immigrés ?, étude statistique de la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), n° 36, juillet 2021.

[3] Sur le terme spécifique, voir notamment l’ouvrage de Stéphane Dufoix, Décolonial, Anamosa, 2023.

[4] Françoise Vergès, « Préface », dans Mathias Rollot, Décoloniser l’architecture, Le Passager Clandestin, 2024, p.7.

[5] « Universalisme » est ici employé pour désigner l’idéologie uniformisante utilisée en guise de justification des multiples pratiques prétendument « républicaines », mais surtout coloniales et impérialistes, menées dans et hors des frontières du pays. Pour une approche plus développée du concept et une ouverture sur la possibilité d’envisager un « universalisme post-colonial » ou un « universalisme situé », voir les récents ouvrages parus chez Anamosa : Julien Suaudeau et Mame-Fatou Niang, Universalisme, 2022 ; Stéphane Dufoix, Décolonial, 2023.

[6] Le régionalisme critique est un terme fondé par les chercheurs en architecture Alexander Tzonis et Liane Lefaivre en 1981 et popularisé en suivant par l’historien de l’architecture Kenneth Frampton. C’est un concept qui a été utile à Frampton pour décrire la pratique de l’architecture de certains de ces contemporains tels qu’Alvar Aalto ou Jorn Utzon, à mi-chemin entre régionalisme et modernité architecturale. Pour Tzonis et Lefaivre, en revanche, cette pratique n’est pas spécifique à la modernité et se retrouve dans toute l’histoire de l’architecture (dès lors que le régionalisme dépasse le simple pittoresque kitsch). Voir Alexander Tzonis, Liane Lefaivre, Architecture of Regionalism in the Age of Globalization, Peaks and Valleys in the Flat World, Routledge, 2020.

[7] Ashish Kothari, Ariel Salleh, Arturo Escobar, Federico Demaria, Alberto Acosta (dir.), Plurivers. Un dictionnaire du post-développement, Wildproject, 2022.

[8] Fatima Ouassak, Pour une écologie pirate. Et nous serons libres, La Découverte, 2023, p.26, 24, 25.

[9] « L’architecture est porteuse de sens : solidité, utilité et beauté, pour reprendre les trois qualités – firmitas, utilitas et venustas – qui doivent être les siennes selon Vitruve. Elle nous permet de ne pas céder à une vision exclusivement fonctionnelle du bâti, mais, au contraire, d’y insuffler de la beauté et de l’harmonie. » Ministère de la Culture, budget 2024 du ministère de la Culture, projet de loi de finances 2024, dossier de presse, 27 septembre 2023, p. 27.

[10] George Bataille, « Architecture », Documents, n° 2, mai 1929

[11] Francis D.K. Ching, « Diversity without order can produce chaos », Architecture : Form, Space & Order, Van Nostrand Reinhold, 1979, p. 332.

[12] Léopold Lambert, « Décoloniser l’architecture », Tumultes, 2017/1, n° 48, p. 175-183.

[13] Françoise Vergès, « Programme de désordre absolu. Décoloniser le musée », La Fabrique, 2023, p.17, p.22, p.18.

[14] Pelin Tan, « Décoloniser l’enseignement de l’architecture » (2017), Plan l****, n°206 Perdre le pouvoir, 2024 ; Shundana Yusaf & Anna Goodman (dir.), Dialectic VII: Architecture and Citizenship. Decolonizing Architectural Pedagogy, 2019 ; Alice Finney, « Architecture education needs “decolonisation and decarbonisation” says London School of Architecture head Neal Shasore », Dezeen, 24 février 2022. Voir aussi le site internet, qui présente les efforts d’un groupe de travail né en 2020 en Angleterre et oeuvrant sur cette question précise.

[15] Dont notamment la récente thèse de Livia Ferreira da França, Décentrement de la pensée écologique et décolonialités en architecture : expérimentations brésiliennes d’un faire-monde par-delà la modernité occidentale, dir. Pierre Fernandez, ENSA Toulouse / LRA, soutenue le 26 juin 2023.

[16] Françoise Vergès, Programme de désordre absolu. Décoloniser le musée, La Fabrique, 2023, p. 20.

[17] « Par hogra, il faut entendre la volonté institutionnelle de terroriser et humilier les individus ; la hongra est l’expression d’une haine en apparence gratuite, du viol de ce qui fait la dignité d’un être, jusqu’à le faire passer sous terre (traduction d’une expression rifaine synonyme de hogra) » Fatima Ouassak, Pour une écologie pirate, La Découverte, 2023, pp.40-41.

[18] Mathias Rollot, « De l’autonome à l’amoral. Réponse à Jacques Herzog », AMC, 2022.

[19] Parmi bien d’autres : Malcom Ferdinand, Une écologie décoloniale. Penser l’écologie depuis le monde caribéen, Seuil, 2019 ; Estienne Rodary, L’apartheid et l’animal. Vers une politique de la connectivité, Wildproject, 2019 ; Baptiste Lanaspèze, Nature, Anamosa, 2022 ; Vandana Shiva, Mémoires Terrestres, Rue de l’échiquier, 2023…

[20] Lesley Lokko, citée par Isabelle Regnier, « À la Biennale de Venise, Lesley Lokko invite l’architecture du futur », Le Monde, 11 mai 2023.

Mathias Rollot

Architecte et enseignant chercheur

Une girafe dans la superstructure

Par

Balayant d'un revers de plume le fait que la biologie néodarwinienne, qui a pris la forme d’une « synthèse moderne » associant étroitement écologie, génétique et mathématiques, est désormais enseignée comme... lire plus

Notes

[1] Aurore Desjonquères et al., « Les métiers des immigrés », Dares, septembre 2021.

[2] Aurore Desjonquères, Bertrand Lhommeau, Moustapha Niang et Mahrez Okba, Quels sont les métiers des immigrés ?, étude statistique de la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), n° 36, juillet 2021.

[3] Sur le terme spécifique, voir notamment l’ouvrage de Stéphane Dufoix, Décolonial, Anamosa, 2023.

[4] Françoise Vergès, « Préface », dans Mathias Rollot, Décoloniser l’architecture, Le Passager Clandestin, 2024, p.7.

[5] « Universalisme » est ici employé pour désigner l’idéologie uniformisante utilisée en guise de justification des multiples pratiques prétendument « républicaines », mais surtout coloniales et impérialistes, menées dans et hors des frontières du pays. Pour une approche plus développée du concept et une ouverture sur la possibilité d’envisager un « universalisme post-colonial » ou un « universalisme situé », voir les récents ouvrages parus chez Anamosa : Julien Suaudeau et Mame-Fatou Niang, Universalisme, 2022 ; Stéphane Dufoix, Décolonial, 2023.

[6] Le régionalisme critique est un terme fondé par les chercheurs en architecture Alexander Tzonis et Liane Lefaivre en 1981 et popularisé en suivant par l’historien de l’architecture Kenneth Frampton. C’est un concept qui a été utile à Frampton pour décrire la pratique de l’architecture de certains de ces contemporains tels qu’Alvar Aalto ou Jorn Utzon, à mi-chemin entre régionalisme et modernité architecturale. Pour Tzonis et Lefaivre, en revanche, cette pratique n’est pas spécifique à la modernité et se retrouve dans toute l’histoire de l’architecture (dès lors que le régionalisme dépasse le simple pittoresque kitsch). Voir Alexander Tzonis, Liane Lefaivre, Architecture of Regionalism in the Age of Globalization, Peaks and Valleys in the Flat World, Routledge, 2020.

[7] Ashish Kothari, Ariel Salleh, Arturo Escobar, Federico Demaria, Alberto Acosta (dir.), Plurivers. Un dictionnaire du post-développement, Wildproject, 2022.

[8] Fatima Ouassak, Pour une écologie pirate. Et nous serons libres, La Découverte, 2023, p.26, 24, 25.

[9] « L’architecture est porteuse de sens : solidité, utilité et beauté, pour reprendre les trois qualités – firmitas, utilitas et venustas – qui doivent être les siennes selon Vitruve. Elle nous permet de ne pas céder à une vision exclusivement fonctionnelle du bâti, mais, au contraire, d’y insuffler de la beauté et de l’harmonie. » Ministère de la Culture, budget 2024 du ministère de la Culture, projet de loi de finances 2024, dossier de presse, 27 septembre 2023, p. 27.

[10] George Bataille, « Architecture », Documents, n° 2, mai 1929

[11] Francis D.K. Ching, « Diversity without order can produce chaos », Architecture : Form, Space & Order, Van Nostrand Reinhold, 1979, p. 332.

[12] Léopold Lambert, « Décoloniser l’architecture », Tumultes, 2017/1, n° 48, p. 175-183.

[13] Françoise Vergès, « Programme de désordre absolu. Décoloniser le musée », La Fabrique, 2023, p.17, p.22, p.18.

[14] Pelin Tan, « Décoloniser l’enseignement de l’architecture » (2017), Plan l****, n°206 Perdre le pouvoir, 2024 ; Shundana Yusaf & Anna Goodman (dir.), Dialectic VII: Architecture and Citizenship. Decolonizing Architectural Pedagogy, 2019 ; Alice Finney, « Architecture education needs “decolonisation and decarbonisation” says London School of Architecture head Neal Shasore », Dezeen, 24 février 2022. Voir aussi le site internet, qui présente les efforts d’un groupe de travail né en 2020 en Angleterre et oeuvrant sur cette question précise.

[15] Dont notamment la récente thèse de Livia Ferreira da França, Décentrement de la pensée écologique et décolonialités en architecture : expérimentations brésiliennes d’un faire-monde par-delà la modernité occidentale, dir. Pierre Fernandez, ENSA Toulouse / LRA, soutenue le 26 juin 2023.

[16] Françoise Vergès, Programme de désordre absolu. Décoloniser le musée, La Fabrique, 2023, p. 20.

[17] « Par hogra, il faut entendre la volonté institutionnelle de terroriser et humilier les individus ; la hongra est l’expression d’une haine en apparence gratuite, du viol de ce qui fait la dignité d’un être, jusqu’à le faire passer sous terre (traduction d’une expression rifaine synonyme de hogra) » Fatima Ouassak, Pour une écologie pirate, La Découverte, 2023, pp.40-41.

[18] Mathias Rollot, « De l’autonome à l’amoral. Réponse à Jacques Herzog », AMC, 2022.

[19] Parmi bien d’autres : Malcom Ferdinand, Une écologie décoloniale. Penser l’écologie depuis le monde caribéen, Seuil, 2019 ; Estienne Rodary, L’apartheid et l’animal. Vers une politique de la connectivité, Wildproject, 2019 ; Baptiste Lanaspèze, Nature, Anamosa, 2022 ; Vandana Shiva, Mémoires Terrestres, Rue de l’échiquier, 2023…

[20] Lesley Lokko, citée par Isabelle Regnier, « À la Biennale de Venise, Lesley Lokko invite l’architecture du futur », Le Monde, 11 mai 2023.