À propos de la restitution des artefacts africains conservés dans les musées d’Occident
Aujourd’hui, la question de savoir s’il faut ou non restituer à leurs ayant-droits les artefacts africains conservés dans les musées d’Occident se pose avec acuité. Très peu, cependant, se préoccupent de comprendre ce qui aura justifié, à l’origine, la migration de ces objets en Europe. Davantage encore, nombreux sont ceux et celles qui ne savent ni quelle est leur valeur esthétique réelle, encore moins de quoi ils furent le signifiant dans la conscience européenne. Il importe, dans ces conditions, de revenir à l’essentiel. Posons-donc les questions de la manière la plus claire possible.

De quoi veut-on précisément se débarrasser et pourquoi ? Que restera-t-il des traces de ces objets en Occident une fois qu’ils auront été rapatriés et quel mode d’existence leur absence rendra-t-elle possible ? Le travail que ces objets étaient supposés accomplir dans l’histoire de la conscience européenne est-il achevé ? Qu’aura-t-il finalement produit et qui devrait en assumer les conséquences ? Après tant d’années de présence de ces objets au sein de ses institutions, l’Europe a-t-elle finalement appris à composer avec ce(ux) qui vien(nen)t du dehors, voire de l’extrême lointain ? Est-elle finalement prête à prendre le chemin vers ces destinations qui restent à venir, ou n’est-elle plus elle-même qu’une pure fêlure, cette chose qui se fend en pure perte, sans profondeur ni perspective ?
En effet, qu’ils aient ou non été liés à l’exercice de cultes ou de rituels particuliers, qu’ils aient ou non été pris pour des œuvres d’art, ces objets souvent jugés déconcertants – à la vérité affaires de traits et de traces – ont toujours suscité de la part de l’Occident toutes sortes de sensations, des sentiments ambigus, des réactions viscérales, voire contradictoires – hantise, fascination et émerveillement, horreur, frustration et répulsion, voire exécration. Partout où ils ont fait leur apparition, ils ont eu tendance à provoquer des effets d’aveuglement. Considérés à l’origine comme des