Deux films allemands. Deux façons de voir l’histoire
Deux films allemands sont sortis sur les écrans au printemps, l’un ovationné, La Révolution silencieuse (mars 2018) de Lars Kraume, l’autre à l’accueil plus mitigé, Transit (avril 2018) de Christian Petzold. Le premier se retrouve encore aujourd’hui dans certaines salles et circulera bientôt dans les écoles, l’autre a pratiquement disparu. Tous deux ont à voir avec la grande histoire, comme on dit, désormais historique et mémorielle à la fois, pourtant le premier la raconte en reflétant une esthétique de la reconstitution dont notre époque est en appétit, le second s’inscrit en faux contre ce canon, nous laissant quasiment sur notre faim. Étude comparée sans concession.
Tout réalisme n’est pas conventionnel. Mais celui qui est le plus souvent adopté, surtout quand il s’agit d’événements historiques, repose sur l’alliance de la reconstitution la plus vraisemblable et de l’émotion que suscitent des personnages facilement reconnaissables ; le spectateur est alors invité à s’identifier à une partie d’entre eux et, de toute façon, à les reconnaître dans un décor qui doit leur sembler naturel. On connaît la critique que Brecht adresse aux facilités ambiguës de ce mimétisme auquel cèdent de nombreuses productions. C’est bien de cela qu’il est question avec La Révolution silencieuse, retraçant un événement contestataire en RDA, en 1956 : la minute de silence d’un groupe de lycéens de Terminale durant un de leurs cours, réagissant à la répression soviétique en Hongrie. Cette protestation douce déclenche une brutale réaction en chaîne de procédures disciplinaires que retrace l’intrigue en concentrant les stéréotypes les plus caricaturaux de la dictature communiste dans une petite ville non loin de Berlin, Stalinstadt (aujourd’hui Eisenhüttenstadt), haut lieu de l’industrie métallurgique.
Lars Kraume y drape certains éléments d’une connotation pseudo nazie (les fonctionnaires, les réunions dans la cour du lycée et même l’apparition d’officiers de l’Armée rouge accoutrés comme