Logement

Un Élan insuffisant face aux crises du logement

Urbaniste, Économiste

Définitivement adoptée mi-octobre, la loi logement 2018, dite loi Élan fragilise le modèle du logement social sans pour autant permettre le développement d’un parc locatif privé abondant et abordable. Les concepteurs de ce texte ayant semble-t-il cédé à l’illusion du « choc de l’offre » – privée s’entend.

Le 19 octobre dernier, le Sénat adoptait la loi portant Évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (Élan). Ce texte fait suite aux importantes mesures d’économies budgétaires mises en œuvre dans la loi de finances pour 2018 et les ambitieux objectifs affichés sur les thèmes du « logement d’abord » et de la reconquête des cœurs de ville.

Si le terme « crise du logement » est absent de l’exposé des motifs du projet de loi Élan, ce dernier souligne « la tension sur la demande de logement » et « la pénurie de logements » dans certains territoires, de même qu’il pose le constat que les politiques mises en œuvre au cours des dernières décennies « ont permis de répondre à certains besoins, mais […] n’ont pour autant pas résolu l’ampleur des problèmes ». Face à ces échecs, le texte insiste sur le besoin de « construire plus, mieux et moins cher » et de faire évoluer le secteur du logement social, insuffisamment efficace aux yeux du gouvernement.

Si le constat est partagé par tous, la cohérence des intentions et des mesures proposées se doit d’être interrogée.

Le constat des crises du logement

Dans l’ouvrage que nous venons de coordonner, nous traçons les contours de ce qu’il est convenu d’appeler Les crises du logement en France, partant du constat d’une situation radicalement différente de celle de la crise quantitative des années 1950 ou 1970.

Les analyses des chercheurs qui y ont contribué à l’ouvrage (économistes, démographe, sociologue, urbaniste) mettent en avant à la fois la persistance d’un nombre élevé de personnes subissant soit le mal logement soit l’accentuation des coûts de la mobilité résidentielle dans les grandes villes du pays, du fait de prix et de loyers de marché devenus inaccessibles. Cette incapacité croissance des ménages à adapter leurs conditions de logement à leurs besoins accroît les mécanismes inégalitaires et le gouffre de plus en plus large qui sépare propriétaires et locataires et, par la même occasion, les générations et les t


[1] Il y a en France 546 logements pour 1 000 habitants contre, par exemple, 510 en Allemagne et 436 au Royaume-Uni.

[2] Il y a en 2018 un peu plus de 36 millions de logements (Insee, 2018). Les bonnes années on en construit entre 400 000 et 420 000, soit 1,16 %. En moyenne au cours des 20 dernières années, on est plutôt à 345 000, soit 0,95 %.

[3] Le reste étant composé de maisons individuelles construites par des particuliers sur leurs terrains et des logements sociaux destinés à la location.

[4] Cet effet, dénoncé par le gouvernement au début du processus, donne pourtant lieu à d’importantes controverses et ne peut être considéré comme prouvé.

[5] En l’espace de 3 ans, le budget alloué aux aides personnelles, pourtant jugé par l’administration du budget comme comptant « parmi les aides sociales les plus redistributives », sera réduit de 20 %. — Voir l’article de Cécile Hagmann dans AOC du 2 juillet 2018,.

Jean-Claude Driant

Urbaniste, Professeur à l’École d’urbanisme de Paris

Pierre Madec

Économiste, Économiste à l'OFCE

Notes

[1] Il y a en France 546 logements pour 1 000 habitants contre, par exemple, 510 en Allemagne et 436 au Royaume-Uni.

[2] Il y a en 2018 un peu plus de 36 millions de logements (Insee, 2018). Les bonnes années on en construit entre 400 000 et 420 000, soit 1,16 %. En moyenne au cours des 20 dernières années, on est plutôt à 345 000, soit 0,95 %.

[3] Le reste étant composé de maisons individuelles construites par des particuliers sur leurs terrains et des logements sociaux destinés à la location.

[4] Cet effet, dénoncé par le gouvernement au début du processus, donne pourtant lieu à d’importantes controverses et ne peut être considéré comme prouvé.

[5] En l’espace de 3 ans, le budget alloué aux aides personnelles, pourtant jugé par l’administration du budget comme comptant « parmi les aides sociales les plus redistributives », sera réduit de 20 %. — Voir l’article de Cécile Hagmann dans AOC du 2 juillet 2018,.