Le procès Fillon: procès de la Ve République ?
L’ « affaire « Penelope/Fillon » a peut-être changé le cours de la Ve République. Elle a en effet précipité la défaite de celui que d’aucuns voyaient comme le grand favori de l’élection présidentielle de 2017. Ironie de l’histoire, quelques mois avant d’être mis en examen, François Fillon s’interrogeait à voix haute : « Qui imagine le général de Gaulle mis en examen ? ». Il assénait dans le même discours de campagne tenu dans la Sarthe, le 28 août 2016 : « avoir une haute idée de la politique signifie que ceux qui briguent la confiance des Français doivent en être digne. » Une assertion qui ne l’empêcha pas finalement de confirmer sa candidature malgré sa propre mise en examen, reniant ainsi l’engagement moral qu’il avait également exprimé : retirer sa candidature « si [s]on honneur était atteint, s’[il] étai[t] mis en examen ».

L’ancien Premier ministre comparaît désormais devant le tribunal correctionnel de Paris. Il est poursuivi pour des chefs d’accusations aussi graves que le « détournement de fonds publics », la « complicité et recel » de ce délit, la « complicité et recel d’abus de biens sociaux », mais aussi le « manquement aux obligations déclaratives de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique ». Derrière le procès des actes d’un homme – et de sa femme –, sont convoquées des mœurs politiques d’une Ve République qui vit au rythme de « scandales » et autres « affaires » illustrant la porosité de la frontière entre morale et politique, entre intérêt public et intérêt privé, entre vie publique et vie privée. C’est pourquoi, au-delà de son caractère purement judiciaire, le « procès Fillon » pourrait revêtir une portée symbolique et historique.
Si les scandales politico-financiers retentissants ne sont pas l’apanage de la Ve République[1], le régime a connu un tournant dans les années 1980-1990. Les « années Mitterrand » sont synonymes d’argent-roi, d’argent fou. Les scandales politico-financiers de financement occulte des partis politiques (de