Santé

Les labyrinthes de la solitude – villes globales, discipline et solitude en temps d’épidémie

Professeur émérite d’histoire de la santé

L’efficacité du confinement dépend du comportement des populations. Respecter les consignes sanitaires implique de la discipline, mais aussi une forme d’anxiété et un contrôle de l’État. Deux exemples distincts permettent de mieux saisir les enjeux sociaux d’un tel confinement dans les villes globales : les capitales asiatiques et Toronto.

Dans notre monde globalisé, une quantité toujours plus grande d’individus se déplace à l’intérieur du réseau des « villes globales » constitué par un petit nombre de grandes métropoles, lesquelles exercent un pouvoir et une influence économique disproportionnés sur le reste de la planète [1].

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Ce réseau est en pratique constitué de trois grands groupes de méga-cités : un groupe a (Los Angeles, Chicago, New York, Londres, Paris, Francfort, Tokyo et Hong Kong) ; un groupe b (São Paulo, Sydney, Mexico, San Francisco, Toronto, Bruxelles, Moscou, Séoul, Madrid, Zürich) ; enfin un groupe c (Buenos Aires, Dallas, Houston, Miami, Atlanta, Washington, Boston, Montréal, Genève, Taipei, Pékin et quelques autres).

Tout au long de cette ossature, dont les « villes globales » forment les nœuds, circule la plus grosse partie des voyageurs du transport aérien (de 30 000 à 40 000 personnes s’envolent chaque jour de Pearson, l’aéroport de Toronto). D’un nœud à l’autre circulent également certains virus : VIH, West Nile, grippe, chikungunya, SRAS, pour n’en citer que quelques-uns.

Technologies de la communication et des transports, marchés, grandes entreprises, organisations internationales, gouvernements et autres institutions, mais aussi familles et parentèles contribuent à « connecter » ces métropoles les unes aux autres. Les relations de Toronto avec le reste du réseau ne reposent pas seulement sur des flux économiques ou technologiques, mais sur des liens familiaux existant entre les diasporas formées par la mosaïque ethnique de la population de Toronto et leur parentèle restée au pays.

Toronto n’est-elle pas connue pour être l’une des villes les plus cosmopolites au monde ? Les Canadiens d’origine chinoise représentaient en 2003 8,7% des 4,7 millions d’habitants de Toronto et de sa région, soit 410 000 personnes [2]. Ces liens familiaux ou de parentèle entre les continents contribuent à expliquer la circulation virale ou microbienne entre les « villes globales ». Ils c


[1] Ali SH et Keil R, « Global Cities and the Spread of Infectious Disease : The case of Severe Acute Respiratory Syndrome (SARS) in Toronto », Urban Studies, 2006, pp. 491-509

[2] Ali et Keil, p. 492

[3] Ali et Keil, p. 500

[4] Ali et Keil, pp. 492-4

[5] Young, interview du 20 mai, 2009

[6] Young, in Ali et Keil, p. 503

[7] Sweetman, p. 130

[8] C. Cheng, « To Be Paranoid is the Standard ? Panic Responses to SARS Outbreak in the Hong Kong Special Administrative Region », Asian Perspective, 2004, pp. 84-5

[9] Cheng, p. 89

[10] Cheng, pp. 85-6

[11] TS Rich, « Taiwan in Crisis : The Politicization of SARS and Chen Shui-bian’s Reelection », Graduate Journal of Asia-Pacific Studies, 2005

[12] Quah et Lee, p. 365

[13] Quah et Lee, pp. 364-68

[14] Rothstein, p. 89

[15] Pr Lee S H (Université de Hong Kong) cité par Rothstein, p. 84

[16] R0 représente « le nombre moyen attendu de nouveaux cas d’infection engendrés par un individu infectieux moyen (au court de sa période d’infectiosité), dans une population entièrement constituée de susceptibles », Sallet G., R0 (INRIA et IRD-EPICASA, 2010)

[17] Riley S., « Transmission Dynamics of the Etiological Agent of SARS in Hong Kong : Impact of Public Health Interventions », Science 300, 2003, p. 1964

[18] Riley et al., pp. 1964-65
Pour Singapour : Tan, p. 346

[19] Riley et al., p. 1964

[20] Riley et al., p. 1965

[21] Hawryluck L., W. L. Gold, S. Robinson et al., « SARS Control and Psychological Effects of Quarantine, Toronto, Canada », Emerging Infectious Diseases, 2004

[22] Young, interview du 20 mai 2009, p. 24

[23] Young, interview du 20 mai 2009, p. 25

[24] DiGiovanni et al, 2004

[25] R. Sheppard, « Why Toronto, Again ? » MacLean’s, 2003, p. 26

[26] R. Maunder et al, « The Immediate Psychological and Occupational Impact of the 2003 SARS Outbreak in a Teaching Hospital », CMAJ 168, 2003, p. 1249
Sur le civisme au superlatif, voir Zylberman P., Tempêtes microbiennes. Essai sur la politique de sécurité sanitaire dans le monde transa

Patrick Zylberman

Professeur émérite d’histoire de la santé, École des hautes études en santé publique

Mots-clés

Covid-19

Notes

[1] Ali SH et Keil R, « Global Cities and the Spread of Infectious Disease : The case of Severe Acute Respiratory Syndrome (SARS) in Toronto », Urban Studies, 2006, pp. 491-509

[2] Ali et Keil, p. 492

[3] Ali et Keil, p. 500

[4] Ali et Keil, pp. 492-4

[5] Young, interview du 20 mai, 2009

[6] Young, in Ali et Keil, p. 503

[7] Sweetman, p. 130

[8] C. Cheng, « To Be Paranoid is the Standard ? Panic Responses to SARS Outbreak in the Hong Kong Special Administrative Region », Asian Perspective, 2004, pp. 84-5

[9] Cheng, p. 89

[10] Cheng, pp. 85-6

[11] TS Rich, « Taiwan in Crisis : The Politicization of SARS and Chen Shui-bian’s Reelection », Graduate Journal of Asia-Pacific Studies, 2005

[12] Quah et Lee, p. 365

[13] Quah et Lee, pp. 364-68

[14] Rothstein, p. 89

[15] Pr Lee S H (Université de Hong Kong) cité par Rothstein, p. 84

[16] R0 représente « le nombre moyen attendu de nouveaux cas d’infection engendrés par un individu infectieux moyen (au court de sa période d’infectiosité), dans une population entièrement constituée de susceptibles », Sallet G., R0 (INRIA et IRD-EPICASA, 2010)

[17] Riley S., « Transmission Dynamics of the Etiological Agent of SARS in Hong Kong : Impact of Public Health Interventions », Science 300, 2003, p. 1964

[18] Riley et al., pp. 1964-65
Pour Singapour : Tan, p. 346

[19] Riley et al., p. 1964

[20] Riley et al., p. 1965

[21] Hawryluck L., W. L. Gold, S. Robinson et al., « SARS Control and Psychological Effects of Quarantine, Toronto, Canada », Emerging Infectious Diseases, 2004

[22] Young, interview du 20 mai 2009, p. 24

[23] Young, interview du 20 mai 2009, p. 25

[24] DiGiovanni et al, 2004

[25] R. Sheppard, « Why Toronto, Again ? » MacLean’s, 2003, p. 26

[26] R. Maunder et al, « The Immediate Psychological and Occupational Impact of the 2003 SARS Outbreak in a Teaching Hospital », CMAJ 168, 2003, p. 1249
Sur le civisme au superlatif, voir Zylberman P., Tempêtes microbiennes. Essai sur la politique de sécurité sanitaire dans le monde transa