L’islam et l’école, une « affaire française »

«C’est compliqué d’être musulman en France. Par exemple, sortir, c’est souvent que j’entends des “pfff !” quand on me voit avec le foulard, ou des personnes qui changent de caisse. C’est un regard particulier, il y a de la haine, de la colère, du coup, moi, je ne comprends pas ces regards».
Ce propos, parmi d’autres que j’aurais également pu choisir, m’a été tenu par une jeune maman française de confession musulmane. Il est extrait des entretiens qui sont au cœur d’Islam et école en France, une enquête de terrain qui paraît en cette rentrée aux presses universitaires de Lyon
L’exigence de comprendre
Ce livre est issu d’une recherche doctorale : d’une enquête, d’une réflexion, d’une écriture dans lesquelles je m’étais profondément engagée tant je mesurais l’urgence et même la nécessité de regarder en face, lucidement, et si possible sans les préjugés qui hélas la recouvrent, la question des rapports entre l’islam et l’école, et plus largement entre l’islam et la société française.
Chacun a pu le constater : cette question, depuis la fin des années 1980, n’a cessé d’envahir l’espace public et les débats politiques.
Je dois hélas constater que les obstacles à une compréhension exigeante et sereine sont devenus presque insurmontables aujourd’hui.
Dans l’opinion dominante, la visibilité croissante de l’islam en France et les affirmations identitaires qui la portent jusque dans l’école sont perçues et commentées comme les conséquences d’un repli communautaire, d’une islamisation, dont les raisons et les responsabilités sont attribuées soit, selon une version « éclairée », à des facteurs externes, géopolitiques, soit, dans une version plus radicale, à une entreprise délibérée d’islamisation de la société française et de son école, avec la complicité aveugle, au sein de l’institution même, de ceux qui refuseraient de la voir.
Tenter de comprendre ce qui arrive, ce qui nous arrive, tenter d’en comprendre les raisons et les enjeux, ou au moins de contribuer à cette