Politique

Les fausses évidences du contrôle des chômeurs et de l’assistanat

économiste

La reconquête de l’espace public par la gauche passe nécessairement par la déconstruction de nombre d’idées idées reçues, parmi lesquelles la nécessité d’un contrôle des chômeurs : quelques chiffres suffisent à rompre avec la caricature de « l’assistanat », prégnante jusque dans les discours de l’exécutif.

«Comment sommes-nous devenus réacs ? », s’interroge Frédérique Matonti dans son dernier ouvrage[1]. Comment sommes-nous parvenus à cette situation où désormais les vieilles lunes éculées de la droite la plus rance s’imposent dans le débat public ? Où une à une, les digues contre l’extrême droite s’effondrent sous les coups de butoirs et les ambiguïtés de droites qui, courant après l’électorat de la première, se sont parfois autoproclamées « décomplexées » ? Et où tous les poncifs du libéralisme économique le plus étroit semblent s’être métamorphosés en évidences incontestables à coup de dénonciation du « politiquement correct » et de nécessité de « briser les tabous » ?

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À travers le monde, la gauche, « cette nébuleuse qui, par-delà sa très grande hétérogénéité et ses conflits internes, a porté les combats en faveur de la liberté, de l’égalité, de la solidarité et du progrès social »[2], semble aujourd’hui prise en étau entre des forces néolibérales, des courants conservateurs et réactionnaires, des tentations autoritaires et diverses formes de populismes. Comment desserrer enfin l’étau ?

Pour cela, la gauche doit bien sûr porter le projet d’une modification en profondeur de nos modes de production, de consommation et de nos modes de vie même – celui d’une « Grande transformation[3] » qui réorientera l’économie vers plus de justice et d’égalité réelle et sur un chemin compatible avec les contraintes écologiques, faisant de l’amélioration du « bien-être collectif » sa ligne d’horizon[4]. Il lui faudra aussi retrouver une crédibilité perdue, notamment auprès des milieux populaires quant à sa capacité à « changer la vie » et à dessiner un avenir collectif meilleur. Cette crédibilité retrouvée passe bien sûr par la cohérence et la solidité de ses propositions, cohérence qui impose une analyse lucide de ses erreurs passées.

Dans le chaos de l’information en continu, des réseaux sociaux et de la concentration des médias, cela lui impose également d’instaurer de n


[1] Frédérique Matonti, Comment sommes-nous devenus réacs ?, Fayard, 2021.

[2] Serge Audier, La société écologique et ses ennemis. Pour une histoire alternative de l’émancipation, Paris, La Découverte, 2017, p. 7.

[3] Voir Isabelle This-Saint-Jean et Arthur Delaporte, « Une “Grande transformation” », L’Ours, hors-série, n° 94-95, janvier-juin 2021.

[4] Isabelle This-Saint-Jean, « L’écologie, condition d’émergence d’une gauche mondiale ? », La Revue internationale et stratégique, n° spécial « Géopolitique de la nature », n°125, hiver 2021, pp. 79-88.

[5] Voir Isabelle This Saint-Jean, « Ils marchaient, s’appuyant sur leur bon sens et leur pragmatisme », AOC, 18 avril 2018.

[6] Voir la définition du Bureau International du Travail / Insee ; les deux autres étant le fait de ne pas travailler et d’être disponible.

[7] Marc Vignaud, « Contrôle des chômeurs : un serpent de mer depuis Nicolas Sarkozy », Le Point, 13 novembre 2021.

[8] « Pôle Emploi détaille son plan pour renforcer les contrôles des demandeurs d’emploi », Le Figaro, 14 décembre 2021.

[9] Voir méthodologie exposée par Eurostat.

[10] « Indemnisation des demandeurs d’emploi en 2020 : impacts de la crise sanitaire », DARES / ministère du travail, octobre 2021.

[11] Les demandeurs d’emplois des deux autres catégories, D et E, sont en effet en emploi.

[12] « Montant de l’allocation chômage versée aux demandeurs d’emploi indemnisés par l’assurance chômage : situation au 31 décembre 2020 », Pôle Emploi.

[13] « Salaire minimum interprofessionnel de croissance (Smic). Données annuelles de 1980 à 2021 », Insee.

[14] Les chiffres de l’Insee sont en effet les suivants : 24 460 euros pour les chômeurs, 38 430 euros pour l’ensemble de la population, 44 960 pour actifs occupés, 31 200 euros pour les inactifs. « Revenu, niveau de vie et pauvreté en 2019. Enquête Revenus fiscaux et sociaux (ERFS) », Insee.

[15] Il s’élève à 15 310 euros quand il est de 22 040 euros pour l’ensemble de la population, de 21 020 euros pour les i

Isabelle This Saint-Jean

économiste, Professeure à l'université Sorbonne Paris-Nord

Notes

[1] Frédérique Matonti, Comment sommes-nous devenus réacs ?, Fayard, 2021.

[2] Serge Audier, La société écologique et ses ennemis. Pour une histoire alternative de l’émancipation, Paris, La Découverte, 2017, p. 7.

[3] Voir Isabelle This-Saint-Jean et Arthur Delaporte, « Une “Grande transformation” », L’Ours, hors-série, n° 94-95, janvier-juin 2021.

[4] Isabelle This-Saint-Jean, « L’écologie, condition d’émergence d’une gauche mondiale ? », La Revue internationale et stratégique, n° spécial « Géopolitique de la nature », n°125, hiver 2021, pp. 79-88.

[5] Voir Isabelle This Saint-Jean, « Ils marchaient, s’appuyant sur leur bon sens et leur pragmatisme », AOC, 18 avril 2018.

[6] Voir la définition du Bureau International du Travail / Insee ; les deux autres étant le fait de ne pas travailler et d’être disponible.

[7] Marc Vignaud, « Contrôle des chômeurs : un serpent de mer depuis Nicolas Sarkozy », Le Point, 13 novembre 2021.

[8] « Pôle Emploi détaille son plan pour renforcer les contrôles des demandeurs d’emploi », Le Figaro, 14 décembre 2021.

[9] Voir méthodologie exposée par Eurostat.

[10] « Indemnisation des demandeurs d’emploi en 2020 : impacts de la crise sanitaire », DARES / ministère du travail, octobre 2021.

[11] Les demandeurs d’emplois des deux autres catégories, D et E, sont en effet en emploi.

[12] « Montant de l’allocation chômage versée aux demandeurs d’emploi indemnisés par l’assurance chômage : situation au 31 décembre 2020 », Pôle Emploi.

[13] « Salaire minimum interprofessionnel de croissance (Smic). Données annuelles de 1980 à 2021 », Insee.

[14] Les chiffres de l’Insee sont en effet les suivants : 24 460 euros pour les chômeurs, 38 430 euros pour l’ensemble de la population, 44 960 pour actifs occupés, 31 200 euros pour les inactifs. « Revenu, niveau de vie et pauvreté en 2019. Enquête Revenus fiscaux et sociaux (ERFS) », Insee.

[15] Il s’élève à 15 310 euros quand il est de 22 040 euros pour l’ensemble de la population, de 21 020 euros pour les i