Santé

Covid-19 vs IA : puissance de la clinique

Philosophe et historien des sciences

Depuis le début des années 2010, la science informatique promet de résoudre tous les problèmes de la médecine par la mise en corrélation de nos données de santé ainsi que par l’optimisation de la gestion des hôpitaux publics. Seulement, aucun de ces systèmes n’a permis d’aider concrètement à résoudre la crise actuelle. Cette dernière met indéniablement en évidence que la technologie de traitement de données ne peut remplacer la puissance de la clinique.

La crise sanitaire du covid-19 montre à quel point les dispositifs technologiques de santé sont fragiles. Au plus fort de la crise sanitaire, seuls les chiffres de mortalité des hôpitaux, comptabilisés au compte-goutte de la mort, ont fait office de preuves « scientifiques » permettant de réguler les effets du virus sur la population.

Où sont donc passés les systèmes de traitement de données massifs capables de gérer la logistique des hôpitaux, de prédire l’apparition d’une épidémie et de trouver des remèdes adaptés à tous types de maladies ? Depuis le début des années 2010, la science informatique promet de résoudre tous les problèmes de la médecine par la mise en corrélation de nos données de santé. Seulement, aucun de ces systèmes n’a permis d’aider concrètement à résoudre la crise actuelle.

La leçon des hôpitaux

L’appauvrissement des hôpitaux publics en matériel et en personnel apparaît aujourd’hui dans le trouble de la logistique. Pour gérer la crise sanitaire du covid-19, le gouvernement français a jonglé entre les services de soins intensifs en transférant les malades d’une région à l’autre afin d’étaler l’afflux de patients dans l’espace et le temps du territoire. Cette décision, rendue possible par le réseau ferroviaire national et les forces belligérantes, a permis d’éviter de lourdes pertes humaines. Néanmoins, cette méthode témoigne d’une forme de désarroi dans la gestion hospitalière de la crise. Sans masques, ni lits, ni respirateurs, on s’est arrangé avec les grands nombres.

Il faut à ce propos rappeler que, depuis quelques années, les intelligences artificielles sont appelées à optimiser la gestion des hôpitaux publics afin de réduire le nombre de lits et de personnels. Des algorithmes, paramétrés selon les indices de gravité à l’admission tels que IGS III, MPM II ou APACHE IV, permettent de réguler le nombre de places en soin intensif par une mise en corrélation des données médicales. Les chances de survie doivent permettre une économie de lits,


[1] A. J. Campbell,  J.A. Cook, G. Adey, B.H. Cuthbertson, Predicting death and readmission after intensive care discharge. British Journal of Anesthesia, Vol.100(5), p. 656–662.

[2] Y. Zhang, et al. (2012) Real-time clinical decision support system with data stream mining. Journal of Biomedicine and Biotechnology 2012: 8.

[3] J. Ginsberg, « Detecting influenza epidemics using search engine query data », Nature 457, 2009, p. 1012-1014.

[4] Gilles Deleuze, Pourparlers, Les éditions de Minuit, 1990, p. 247.

Mathieu Corteel

Philosophe et historien des sciences, Chercheur associé à Sciences Po et à Harvard

Mots-clés

Covid-19

Notes

[1] A. J. Campbell,  J.A. Cook, G. Adey, B.H. Cuthbertson, Predicting death and readmission after intensive care discharge. British Journal of Anesthesia, Vol.100(5), p. 656–662.

[2] Y. Zhang, et al. (2012) Real-time clinical decision support system with data stream mining. Journal of Biomedicine and Biotechnology 2012: 8.

[3] J. Ginsberg, « Detecting influenza epidemics using search engine query data », Nature 457, 2009, p. 1012-1014.

[4] Gilles Deleuze, Pourparlers, Les éditions de Minuit, 1990, p. 247.