Éducation

Quels savoirs pour une école juste ?

Chercheur en sciences de l'éducation, Ancien ingénieur de recherche à l’INRP

La rentrée scolaire a vu Emmanuel Macron dresser de lui-même un bilan très négatif de l’état du système scolaire, sans pour autant remettre en cause les mécanismes de sélection qui président à son fonctionnement. Mère de toutes les batailles, l’injustice à l’école ne donne lieu qu’à des mesurettes, alors qu’elle supposerait une refonte complète. En effet, sans justice scolaire, sans égalité dans l’accès au savoir, comment la France peut-elle prétendre à la démocratie ?

Le 25 août, le Président de la République s’est adressé en Sorbonne aux recteurs et autres responsables du sommet de la pyramide Éducation nationale, ce qui est rare. Cet exercice de rentrée traditionnel est un passage obligé pour tout ministre qui se doit d’exposer à sa haute hiérarchie la politique qu’il entend lui faire exécuter. Mais, cette année, c’est le Président qui a utilisé cette tribune pour tenir un surprenant discours.

publicité

En effet, dans un premier temps, l’orateur a dressé un constat sévère de la situation de l’école : « Force est de constater que tout ne va pas bien dans le meilleur des mondes […] trop d’élèves malheureux, trop de parents d’élèves anxieux, […] ça veut dire que quelque chose ne marche pas dans notre organisation collective […]. » À l’entendre, on pouvait se demander si ce constat qui dresse le portrait d’une école injuste allait être le prélude aux premières mesures audacieuses de la « révolution culturelle » annoncée le 2 juin dernier à Marseille ?

Peine perdue ! Comme l’ont fait avant lui tous les ministres depuis le début du siècle, le Président s’est limité dans un second temps à égrainer un certain nombre de « mesures » dont le tableau d’ensemble, qui évite les questions de fond, ne permet absolument pas de répondre à la situation pourtant si gravement décrite.

Voici donc un Président qui entame un second quinquennat (exploit inédit depuis son instauration) et qui feint de découvrir l’état de l’école ! Au sommet de l’État depuis la présidence Hollande, comment peut-il, sans jouer une pitoyable comédie, prétendre découvrir les questions soulevées par l’un des premiers postes de dépenses publiques, comment peut-il jouer les naïfs Cassandre pour exonérer ses prédécesseurs et s’exonérer de la détérioration du fonctionnement de l’école et de ses résultats pour les laissés-pour-compte du système (relégués, décrocheurs, exclus), de l’augmentation de l’angoisse des élèves et familles devant la compétition reine, pour ignorer aussi l


[1] On pense évidemment aux travaux de sociologie de l’éducation. Lire dans AOC, François Dubet, « Sortir des contradictions du collège », 31 août 2022

[2] Jean-Pierre Véran, « Pour en finir avec l’École injuste, repenser les savoirs scolaires », blog Mediapart, 22 août 2022

[3] Cette notion est développée dans notre livre qui vient de paraître : Philippe Champy et Roger-François Gauthier, Contre l’École injuste !, ESF, août 2022

[4] Edgar Morin, Réveillons-nous !, Denoël, 2022

Roger-François Gauthier

Chercheur en sciences de l'éducation, Professeur associé à l'université Paris-Descartes

Philippe Champy

Ancien ingénieur de recherche à l’INRP, Ancien directeur des éditions Retz

Notes

[1] On pense évidemment aux travaux de sociologie de l’éducation. Lire dans AOC, François Dubet, « Sortir des contradictions du collège », 31 août 2022

[2] Jean-Pierre Véran, « Pour en finir avec l’École injuste, repenser les savoirs scolaires », blog Mediapart, 22 août 2022

[3] Cette notion est développée dans notre livre qui vient de paraître : Philippe Champy et Roger-François Gauthier, Contre l’École injuste !, ESF, août 2022

[4] Edgar Morin, Réveillons-nous !, Denoël, 2022